L’administration complète ses commentaires sur le nouveau régime des brevets

29/04/20

eAlerte fiscale

L’administration complète ses commentaires sur le nouveau régime des brevets

Dans un BOFIP publié le 22 avril 2020, l’administration met à jour ses commentaires sur le nouveau régime de la propriété intellectuelle, initialement publiés en juillet 2019 et soumis alors à consultation publique.

Ces nouveaux commentaires apportent d’intéressantes précisions sur le champ d’application et les modalités d’imposition au nouveau régime issu des dispositions de la loi de finances pour 2019, codifié à l’article 238 du CGI, et applicable aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019. Ils abordent également les modifications apportées à ce nouveau régime par les dispositions des articles 50 et 56 de la loi de finances pour 2020.  

Nous présentons ci-après les principales précisions apportées par l’administration.

  • Champ d’application du nouveau régime de l’article 238

Le nouveau BOFIP précise que lorsqu’une invention est protégée en France, dans un Etat membre de l’UE ou dans autre Etat partie à l’accord sur l’EEE par un titre mentionné au 1° du I de l’article 238 du CGI (à savoir un brevet, un certificat d’utilité ou un certificat complémentaire de protection rattaché à un brevet), il est admis que les redevances perçues au titre de la concession de licence d’exploitation de cette invention dans les territoires où elle n’est pas protégée soient également comprises dans le résultat net de concession (BOI-BIC-BASE-110-10, n° 290).

Toutefois, la référence aux seules inventions bénéficiant d’un titre de protection mentionné au 1° du I de l’article 238 semble exclure du champ de la tolérance les autres types d’actifs incorporels comme par exemple les certificats d’obtention végétale. Une telle différence de traitement entre ces différents actifs n’est pas sans soulever certaines interrogations.

  • Mise à disposition du nouvel imprimé à joindre à la déclaration de résultat 

L’option pour le nouveau régime constitue une décision de gestion, matérialisée par le respect  d’obligations déclaratives. Ainsi, conformément aux dispositions de l’article 238 V du CGI, les entreprises sont tenues de joindre à leur déclaration, au titre de chaque exercice, une annexe détaillant, pour chaque actif, bien ou service ou famille de biens ou services, les calculs réalisés pour déterminer d’une part le résultat net de cession de concession ou de sous-concession et d’autre part, le rapport d’assujettissement (encore appelé, « ratio nexus »).

Cette annexe qui porte le n° 2468-SD vient d’être mise en ligne par l’administration. Il apparaît toutefois que cet imprimé, présenté sous forme de tableau, ne mentionne pas, contrairement à ce qu’indique le BOFIP (BOI-BIC-BASE-110-20, n° 150), le détail des calculs des différents paramètres permettant de déterminer le montant du revenu net soumis au taux d’imposition de 10 % (et notamment le calcul du » ratio nexus »). Les contribuables devront donc veiller à disposer par ailleurs d’un calcul bien précis de ces éléments. C’est l’objet de l’obligation documentaire prévue par l’article L 13 BA du LPF.

  • Détermination du résultat net de cession, concession ou sous-concession

Ce résultat est, en application du 1 du II de l’article 238 du CGI, déterminé par différence entre les revenus de l’exercice tirés des actifs éligibles et les dépenses de R&D réalisées directement ou indirectement par l’entreprise et qui ont un lien direct avec ces actifs.

L’article 238, I, 1 du CGI précise qu’au titre du premier exercice pour lequel ce revenu net est calculé, celui-ci est diminué de l’ensemble des dépenses en lien direct avec la création, l’acquisition et le développement de l’actif incorporel, y compris celles réalisées antérieurement au cours des exercices ouverts à compter de la date à laquelle l’option pour le régime de l’article 238 est exercée par l’entreprise.

Toutefois, une entreprise qui n’opterait pour ce régime qu’à compter de l’exercice au titre duquel elle perçoit pour la première fois des revenus provenant des actifs incorporels éligibles n’aurait aucun retraitement lié aux dépenses antérieures à effectuer.

Par ailleurs, les nouveaux commentaires précisent que si l’option est exercée non par actif mais par produit ou famille de produits (ci-après « groupe d’actifs »), en cas de rattachement d’un actif à un groupe d’actifs, postérieurement au premier exercice de réalisation d’un revenu au titre de ce groupe d’actifs, la notion de « dépenses de  R&D engagées antérieurement » ne concerne pas celles engagées avant le rattachement de l’actif concerné (BOI-BIC-BASE-110-30, n° 140)    

  • Dépenses externalisées

Pour le calcul du rapport d’assujettissement (ou « ratio nexus »), l’article 238, III du CGI prévoit que les dépenses retenues au numérateur s’entendent de celles qui sont en lien direct avec la création et le développement de l’actif incorporel, réalisées directement par le contribuable ou par des entreprises sans lien de dépendance au sens de l’article 39, 12 du CGI.

Ces dispositions ont pu susciter un certain nombre d’interrogations sur le sort des dépenses sous-traitées auprès d’une entité non liée mais refacturées par une entité liée, cas fréquent en pratique dans les groupes.

Dans ses nouveaux commentaires, l’administration répond à ces inquiétudes en précisant que les dépenses de R&D externalisées auprès d’entreprises non liées peuvent être considérées comme telles lorsqu’elles ont été supportées par une entité liée qui les a refacturées sans marge à l’entreprise ayant exercé l’option pour l’actif ou le groupe d’actifs considéré. Il incombe cependant à l’entreprise de justifier de cette refacturation sans marge en produisant les factures émises, d’une part par l’entité non liée et d’autre part par l’entité liée (BOI-BIC-BASE-110-30 n° 190).

  • Imputation du revenu net bénéficiaire sur les déficits ordinaires

Dans le cadre des commentaires antérieurs mis en consultation publique, l’administration avait précisé que le résultat net bénéficiaire d’un exercice en principe taxé au taux de 10 % pouvait aussi, sur décision de gestion de l’entreprise, servir à compenser le déficit fiscal de l’exercice, sans par conséquent remettre en cause l’option pour le régime de faveur. Cette tolérance a, par la suite, été légalisée par la loi de finances pour 2020, sans toutefois prévoir d’imputation sur les déficits reportables au titre des exercices antérieurs.

L'administration précise cependant que même si, en interprétant strictement les termes des articles 158-4, 219, I-a et 223 C du CGI, la compensation n’est possible qu’avec le déficit de l’exercice même au cours duquel est apparu le résultat net bénéficiaire, à l’exclusion des déficits reportables d’exercices antérieurs, il est admis que le résultat net bénéficiaire puisse également être compensé avec les déficits fiscaux qui demeurent reportables sur les bénéfices de cet exercice. La compensation ainsi prévue est opérée euro pour euro. Le Bofip précise qu’elle est facultative pour l’entreprise et peut ne porter que sur une partie seulement du déficit fiscal de cet exercice ou des déficits fiscaux reportables (BOI-BIC-BASE-110-30 n° 380).

  • Intégration fiscale

Dans l’intégration fiscale, l’article 223 H du CGI prévoit que c’est la société mère du groupe qui opte pour le régime de faveur. Le calcul du revenu net imposable au taux réduit et du ratio de déduction est ensuite effectué au niveau du groupe fiscal.

Les précisions apportées par l’administration dans le cadre du régime de droit commun s’appliquent également dans le cadre de l’intégration fiscale. Ainsi :

- les dépenses de R&D externalisées auprès d’entités non liées à une société membre du groupe peuvent être considérées comme telles lorsqu’elles ont été payées par l’intermédiaire d’une entité liée et refacturées sans marge par cette dernière à l’entreprise titulaire de l’actif considéré (BOI-IS-GPE-20-20 n° 120) ;

- le résultat net bénéficiaire d’un exercice peut, par tolérance, être compensé non seulement avec le déficit de l’exercice mais aussi avec celui des exercices antérieurs (BOI-IS-GPE-20-20 n° 190)

Par ailleurs, l’article 223 H du CGI précise que la valeur vénale des actifs détenus par une société à la date de son entrée dans le groupe constitue une dépense d’acquisition retenue pour le calcul du résultat net d’ensemble de concession au titre du premier exercice au cours duquel la société mère exerce l’option, et qu’elle est prise en compte au dénominateur du rapport d’assujettissement.

Cette solution est susceptible d’affecter défavorablement le calcul du rapport d’assujettissement lorsque des entités détentrices de droits de propriété intellectuelle ont récemment rejoint le groupe. Cet effet est néanmoins tempéré par les commentaires de l’administration pour les sociétés entrées dans un groupe fiscal avant l’entrée en vigueur du nouveau régime. En effet, il est précisé que ces dispositions ne s’appliquent pas lorsque l’entrée de la société dans le groupe fiscal est intervenue avant le 1er janvier 2019. Ainsi, la valeur vénale des actifs détenus par une société préalablement à son entrée dans un groupe fiscal intervenue avant cette date ne sera pas traitée comme des dépenses d’acquisition d’un actif incorporel par le groupe. Le ratio nexus du groupe ne sera donc pas altéré à ce titre (BOI-IS-GPE-20-20 n° 230).

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Marie-Hélène Pinard-Fabro

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Avocat, Directeur, PwC Société d'Avocats

Valérie Aelion

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