Provisions des captives de réassurance : publication du décret et des commentaires administratifs

14/06/23

eAlerte fiscale

Un décret du 7 juin 2023 précise les modalités d’application du dispositif créé par la loi de finances pour 2023 visant à permettre aux entreprises captives de réassurance établies en France de constituer des provisions pour résilience fiscalement déductibles. Il précise notamment les plafonds applicables, et fixe les règles de comptabilisation et de déclaration de ces provisions.

Consécutivement, dans une mise à jour de la base BOFiP du 14 juin 2023, l’administration fiscale publie ses commentaires relatifs au dispositif, intégrant les dispositions législatives et règlementaires (BOI-BIC-PROV-60-70-15). Sans surprise, elle étend aux provisions pour résilience des captives de réassurance ses commentaires relatifs au dispositif des provisions pour égalisation, notamment pour ce qui concerne le sort de la provision, en cas de cession ou cessation d’entreprise, ainsi que les transferts de portefeuille.

La loi de finances pour 2023 a créé, à compter du 1er janvier 2023, un régime fiscal spécifique pour les captives de réassurance définies à l’article L. 350-2, 3° du Code des assurances. Afin de faciliter leur constitution en France par les entreprises non financières, la loi a mis en place un régime fiscal favorable et favorise ainsi une meilleure offre assurantielle, en permettant à ces entreprises de négocier auprès d’assureurs tiers (« fronteurs ») une couverture mieux adaptée à leurs besoins.

L’article 6 de la loi de finances pour 2023 a ainsi complété les dispositions de l’article 39 quinquies G du CGI d’un paragraphe II qui prévoit que les entreprises captives de réassurance  détenues par une entreprise autre qu’une entreprise financière et qui ont pour objet la fourniture d’une couverture de réassurance portant exclusivement sur les risques d’entreprises autres que des entreprises financières peuvent constituer, en franchise d’impôt, une provision destinée à faire face aux charges afférentes aux opérations de réassurance acceptée dont les risques d’assurance relèvent des catégories suivantes :

  • dommages aux biens professionnels et agricoles,
  • catastrophes naturelles,
  • responsabilité civile générale,
  • pertes pécuniaires,
  • dommages et pertes pécuniaires consécutifs aux atteintes aux systèmes d’information et de communication,
  • transports.

Limite de déductibilité de la dotation annuelle

Complétant les dispositions législatives, le décret n° 2023-449 du 7 juin 2023 fixe la limite de la dotation annuelle de la provision pour résilience à 90 % du montant du bénéfice résultant de la somme des bénéfices techniques associés à chaque catégorie de risques concernée (CGI ann. II, art. 16 A, II nouveau). Cette formulation apparaît assez favorable en présence de pertes techniques sur certains risques puisqu’elle ne vise pas l’agrégation des résultats techniques mais l’agrégation des bénéfices techniques.

La notion de bénéfices techniques à retenir pour le calcul de cette limite est la même que celle retenue pour les provisions pour égalisation des entreprises d’assurance et de réassurance (CGI, art. 39 quinquies G, I), et définie par les dispositions de l’article 16 B de l’annexe II au CGI comme la différence entre :

  • d'une part, les primes de l'exercice nettes d'annulation et diminuées de la dotation aux provisions de primes et,
  • d'autre part, le montant des charges de sinistres nettes de recours augmenté des frais directement imputables à la branche considérée ainsi que d'une quote-part des autres charges ventilées selon les modalités fixées au plan comptable de l’assurance (BOI-BIC-PROV-60-70-15 § 60).

On notera que l’administration précise dans ses commentaires que le bénéfice technique à retenir pour le calcul de la dotation annuelle est celui déterminé avant application de la réintégration prévue au 3ème alinéa du II de l’article 39 quinquies G du CGI, c’est-à-dire avant prise en compte des dotations devant faire l’objet d’une reprise à l’issue d’un délai de quinze ans du fait de leur non-utilisation conformément à leur objet (BOI-BIC-PROV-60-70-15 § 60).   

Plafond global de la provision

Le décret fixe la limite du montant global de la provision pour résilience à dix fois le montant moyen, sur les trois dernières années, du minimum de capital requis (MCR) tel que défini par le régime européen « Solvabilité II » et prévu par l'article L. 352-5 du code des assurances (CGI ann. II, art. 16 A, II nouveau).

Comptabilisation et déclaration de la provision

Le décret étend aux provisions pour résilience les conditions de comptabilisation et de déclaration prévues pour les provisions pour égalisation des entreprises d’assurance et de réassurance prévues à l’article 16 C de l’annexe II au CGI.

Ces provisions devront ainsi figurer sur le tableau des provisions prévu par l’article 38 de l’annexe III au CGI, étant noté que le défaut de production du tableau des provisions, ou la fourniture de renseignements incomplets entraîne l'application d'une amende égale à 5 % des sommes ne figurant pas sur le tableau, taux ramené à 1 % lorsque les sommes correspondantes sont réellement déductibles (CGI, art. 1763, I). L’amende n’est pas applicable en cas de première infraction commise au cours de l’année civile en cours et des trois années précédentes lorsque les intéressés ont réparé leur omission soit spontanément soit à la première demande de l’administration avant la fin de l’année qui suit celle au cours de laquelle le document devait être présenté.

Les entreprises constituant de telles provisions seront également tenues de fournir, à l'appui de la déclaration des résultats de chaque exercice, les deux états suivants :

  • un compte de résultat technique établi pour chacune des catégories ou sous-catégories de risques faisant l'objet de la provision concernée ;
  • un état retraçant séparément le montant des dotations de chaque exercice et comportant l’indication du montant des sommes utilisées à la compensation des résultats techniques déficitaires et le montant de la dotation antérieure qui a fait l'objet d'une réintégration dans le bénéfice imposable.

Sort de la provision

Dans son nouveau BOFIP, l’administration précise qu’en cas de cession ou de cessation d'entreprise, la provision antérieurement constituée doit être rapportée aux résultats du dernier exercice d'exploitation.

Elle étend au dispositif des provisions pour résilience des captives de réassurance ses commentaires relatifs au sort de la provision pour égalisation en cas de fusion (BOI-BIC-PROV-60-70-15 § 140 et 150) en précisant que la provision n'est pas considérée comme un élément du bénéfice immédiatement imposable, dès lors que les conditions légales de constitution de la provision ne cessent pas d'être réunies en cas de fusion de sociétés ou d'opération assimilée réalisée sous le régime de faveur des fusions.

Les nouveaux commentaires administratifs précisent également le sort de la provision en cas de transfert de tout ou partie d’un portefeuille de contrats. Dans cette hypothèse, la provision correspondant aux risques cédés est également transférée et rapportée au bénéfice imposable de la nouvelle captive de réassurance dans les mêmes conditions que l'aurait fait la captive de réassurance initiale en l'absence d'une telle opération (BOI-BIC-PROV-60-70-15 § 160). 

Le délai de quinze ans au-delà duquel la provision doit être rapportée doit être décompté à partir de l'exercice de comptabilisation des dotations à la provision dans les comptes de la captive de réassurance qui a initialement constitué la provision.

Ces règles s'appliquent quelle que soit la forme du transfert (cession, apport partiel d'actif ou fusion de sociétés).


Pour aller plus loin

{{filterContent.facetedTitle}}

{{filterContent.facetedTitle}}

{{contentList.dataService.numberHits}} {{contentList.dataService.numberHits == 1 ? 'result' : 'résultats'}}
{{contentList.loadingText}}
Suivez-nous !

Contactez-nous

Charlotte Guincestre Carpentier

Charlotte Guincestre Carpentier

Fiscaliste, Département Doctrine, PwC Société d'Avocats

Masquer