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MACF : dépôt du premier rapport avant le 31 janvier 2024

Réunion d'affaires
  • Publication
  • 22 janv. 2024

Afin de renforcer ses ambitions climatiques, réaffirmées notamment dans son rapport "Fit for 55", et de contrecarrer les politiques environnementales moins strictes de certains pays tiers, l’Union européenne a souhaité se doter d’un Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (« MACF » ou « CBAM » pour « Carbon Border Adjustment Mecanism » en anglais).

L’objectif du MACF est de lutter contre les fuites de carbone, autrement dit, de limiter la délocalisation de la production de certains produits à forte intensité de carbone par des entreprises européennes à l’étranger. Le nouveau dispositif vise ainsi à soumettre l’importation de certains produits à une tarification équivalente à celle appliquée par les industriels européens dans le cadre du Système d'échanges de quotas d'émissions (SEQE-UE).

Le Règlement (UE) 2023/956 établissant le MACF, en date du 10 mai 2023, est entré en application le 1er octobre 2023 dans sa phase transitoire. Désormais, l’importation des produits mentionnés à l’annexe I au Règlement précité (i.e. ciment, fer, acier, aluminium, engrais, hydrogène et électricité), et d’une valeur intrinsèque supérieure à 150 euros, implique le respect d’obligations spécifiques. On notera que le Règlement MACF ne s'applique pas aux marchandises originaires des Etats membres de l’Espace économique européen (EEE), de la Suisse et de certains territoires.

Deux phases de mise en œuvre

Deux phases sont à distinguer dans la mise en œuvre de ce mécanisme d’ajustement carbone aux frontières :

  • Une phase transitoire pour la période comprise entre le 1er octobre 2023 et le 31 décembre 2025 : le déclarant des marchandises soumises au MACF doit déposer un rapport MACF, à la fin de chaque trimestre, mentionnant les émissions des marchandises importées. A noter qu’aucun paiement n’est à réaliser pendant cette phase de transition.
  • Une phase d’implémentation à compter de janvier 2026 : le déclarant devra notamment respecter les obligations suivantes :

o  Disposer du statut de déclarant MACF autorisé en amont de toute importation ;

o  Acheter des certificats MACF ;

o  Déposer une « déclaration MACF » annuelle récapitulant les données des importations de l’année civile précédente.

Quelles sont les démarches à accomplir pendant la phase de transition ?

1)      Création d’un compte et accès à la plateforme MACF en France

Les opérateurs ont d’ores et déjà accès à la plateforme de déclaration en France, ce qui n’est pas le cas de tous les Etats membres de l’Union européenne. En effet, il existe semble-t-il de nombreuses disparités au sein de l’Union européenne quant à l’accès à la plateforme, rendant ainsi plus difficile le respect de l’obligation déclarative au 31 janvier 2024 dans ces Etats.

En France, les opérateurs doivent notamment disposer :

  • d’un compte certifié sur le site de la douane, rattaché à un numéro EORI ;
  • d’une habilitation à l’accès au registre MACF.

L’opérateur devra se connecter au registre MACF[1] avec les identifiants et mots de passe de son compte Prodouane, afin de pouvoir déposer le rapport trimestriel.

2)      Calcul des émissions : publication des valeurs par défaut (« default values ») par la Commission européenne

Pendant la phase de transition, les opérateurs peuvent déclarer leurs importations par le biais de plusieurs méthodes de calcul des émissions :

  • la méthode préconisée par la Commission ( « méthode UE ») ;
  • une méthode équivalente ;
  • sur la base des valeurs par défaut.

Il semble que nombre d’opérateurs seront tentés d’utiliser les valeurs par défaut (publiées par la Commission européenne le 22 décembre 2023), pour le dépôt de leur premier rapport MACF. En effet, ces valeurs par défaut permettent notamment aux opérateurs qui n’ont pas eu l’opportunité de collecter toutes les informations nécessaires auprès de leurs fournisseurs de simplifier les démarches en vue du dépôt du rapport.

Dans ce cadre, les opérateurs peuvent se référer à la table fournie par nomenclature douanière (au niveau de la position tarifaire à 4 chiffres, de la sous-position à 6 chiffres ou de la nomenclature combinée à 8 chiffres), indiquant les valeurs par défaut de chaque produit soumis, qu’il s’agisse des émissions directes, indirectes ou totales.

En principe, l’utilisation de ces valeurs par défaut ne pourra intervenir que jusqu’au dépôt de la déclaration du 2ème trimestre 2024 en juillet 2024. A partir de la déclaration du 3ème trimestre 2024, les opérateurs ne pourront utiliser les valeurs par défaut que sous certaines conditions.

3)      Dépôt du rapport trimestriel MACF avant le 31 janvier 2024, puis tous les trimestres

Les déclarants doivent déposer, avant le 31 janvier 2024, le premier rapport trimestriel MACF - couvrant la période de reporting du 1er octobre au 31 décembre 2023.

Le rapport devra notamment mentionner :

  • La quantité totale de chaque produit importé (en MWh pour l’électricité ou en tonnes pour les autres marchandises) ;
  • Le total des émissions (en tonnes de CO2 par MWh ou tonne) ;
  • Le prix du carbone déjà payé dans le pays de départ, le cas échéant.

Il est intéressant de noter qu’aura la qualité de déclarant, et donc l’obligation de respecter les exigences précitées, l’importateur des produits ou bien son représentant en douane enregistré (RDE) agissant dans le cadre d’un mandat de représentation indirecte[2].

Par ailleurs, nous attirons votre attention sur le fait que le pays de rattachement pour le MACF est déterminé par le pays d’émission du numéro EORI de l’opérateur. Ainsi, un opérateur ayant un numéro EORI français, devra déposer son rapport MACF depuis son compte Prodouane français, rattaché à son numéro EORI, pour toutes les importations ayant eu lieu dans l’Union européenne. Un seul rapport doit donc être déposé pour l’intégralité des importations.

Enfin, il est à noter que des versions actualisées des orientations de la Commission ainsi que de la FAQ ont été publiées le 22 décembre 2023 par la Commission. De même, un avis aux importateurs concernant le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières a été publié dans le Journal Officiel de la République Française le 14 décembre 2023.

Une phase d'apprentissage en 2024

De manière générale, les autorités compétentes semblent vouloir prôner une période de clémence et d’apprentissage au début de cette phase de transition, afin de permettre aux opérateurs de mettre en place les processus internes nécessaires.

Ainsi, il sera possible d’amender, jusqu’au 31 juillet 2024, les premières déclarations déposées. De plus, à ce stade, il ne sera pas nécessaire de faire appel à un vérificateur accrédité.

Les opérateurs sont ainsi invités à profiter de cette période pour mettre en place l’ensemble des processus nécessaires à la correcte application du dispositif dans le court terme.

C’est pourquoi il est primordial pour les opérateurs de s’assurer :

  • De la possibilité, pour les fournisseurs étrangers, de transmettre des informations fiables et dans un délai raisonnable ;
  • De la mise en place de la bonne organisation en interne permettant un traitement efficace et conforme de ces nouvelles obligations ;
  • De la correcte classification de leurs marchandises importées permettant une vérification appropriée du champ d’application du dispositif. 

Sur ce dernier point, on peut d'ores et déjà anticiper une recrudescence des contrôles douaniers s’agissant de l’espèce tarifaire des marchandises, afin de prévenir toute tentative de contournement des obligations MACF par les opérateurs, notamment par la déclaration de marchandises non soumises au mécanisme.

Enfin, il convient de rappeler que des sanctions en cas de non-respect du règlement MACF et notamment du non-dépôt du rapport trimestriel pourraient trouver à s’appliquer dès à présent (sanctions allant de 10 à 50 € par tonne d’émissions non déclarées).

Les sanctions devraient être progressives et proportionnées pendant le début de cette phase transitoire, les administrations compétentes devant se borner, dans un premier temps, à inviter les opérateurs à améliorer, compléter ou corriger les prochains rapports trimestriels, puis à les mettre en demeure en cas d’absence de dépôt de rapport.

A noter qu’en cas d’infractions répétées, les opérateurs pourraient se voir déclarer inéligibles pour le statut de déclarant MACF, statut obligatoire à compter de 2026. Une attention particulière doit ainsi être portée au respect des obligations imposées et notamment le dépôt des rapports en question.


[1] https://cbam.ec.europa.eu/declarant

[2] Si l’importateur est établit dans l’Union Européenne, le RDE en question a la possibilité de dénoncer aux obligations en question en notifiant son client.

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Avocat, Associé, ESG Leader, PwC Société d'Avocats

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