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Accord sur les droits de douane et le commerce entre l’Union européenne et les Etats-Unis

Bateau container
  • 01 août 2025

Un accord commercial a été conclu entre l’Union européenne et les États-Unis d’Amérique le dimanche 27 juillet 2025, à l’occasion de la visite du président américain au Royaume-Uni (1).  L’annonce, faite par la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, marque une étape importante dans l’apaisement des tensions commerciales transatlantiques. Toutefois, après plusieurs mois de négociations et d’incertitude économique, l'accord est largement critiqué non seulement par les Etats-Membres, mais également par les représentants des secteurs économiques concernés, dont l’avenir reste incertain.

 

Cet accord s’inscrit dans la lignée de plusieurs accords commerciaux récents conclus par les États-Unis, visant à renforcer leurs partenariats stratégiques et à rééquilibrer leurs relations économiques avec leurs principaux partenaires.

(2) * S’agissant de la Chine, le tarif douanier de base est actuellement de 30 %. Cependant, une trêve a été conclue entre les deux pays jusqu’au 12 août, après cette date les tarifs devraient augmenter de 10 %. Selon les discussions tenues ces deux derniers jours lors d’une rencontre entre les deux parties à Stockholm, une prolongation de la trêve au-delà de ce délai reste envisageable (3).

La liste complète des pays et des tarifs réciproques est disponible en annexe (4).

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S’agissant des droits sur les importations originaires de l’UE cet accord intervient dans un contexte de tensions croissantes, amorcées par l’instauration le 2 avril dernier par les États-Unis, lors du « Liberation Day », de droits de douane « réciproques » de 20 % sur la majorité des produits originaires de l’Union européenne, ces droits ayant été ensuite suspendus à compter du 9 avril (5).

Depuis cette date, se sont succédé une série d’annonces relatives à des mesures de rétorsion, de part et d’autre de l’Atlantique, conduisant à une situation particulièrement anxiogène pour les secteurs économiques concernés.

L’accord trouvé le 27 juillet devrait, on l’espère, mettre fin à certaines incertitudes, même si tous ses détails ne sont pas encore fixés.  

L'accord Etats-Unis / Union européenne

Les termes de l’accord

L’accord prévoit que les États-Unis appliqueront un droit de douane de 15 % sur la majorité des exportations européennes à partir du 7 août 2025. Les secteurs concernés incluent notamment l’automobile, les semi-conducteurs et les produits pharmaceutiques (6).

Certaines exemptions sont toutefois prévues selon l’approche « zéro pour zéro » pour un certain nombre de produits stratégiques parmi lesquels : les aéronefs et pièces d’aéronefs, certains produits chimiques, des médicaments génériques, des équipements liés aux semi-conducteurs, certains produits agricoles, et des ressources naturelles et matières premières critiques (7)

Des règles d’origine strictes seront également mises en place pour garantir que seuls les produits originaires de l’UE et des États-Unis bénéficieront de l’accord, avec pour objectif d’éviter les contournements.

En ce qui concerne l’acier et l’aluminium, selon la déclaration de la présidente de la Commission, les droits de douane actuels (50 %) seront réduits et un système de quotas sera mis en place. Toutefois, selon la fiche d’information (« Fact Sheet ») publiée par la Maison-Blanche en date du 28 juillet 2025, les droits de douane sectoriels sur l’acier et l’aluminium resteraient inchangés (8).

L’accord intègre plusieurs engagements additionnels, notamment en ce qui concerne les barrières tarifaires. L’Union européenne collaborera avec les États-Unis afin de supprimer certains droits de douane et d’accorder des quotas, ce qui facilitera l’accès des produits américains au marché européen.

Par ailleurs, l’UE s’engage à alléger les contraintes réglementaires qui pèsent sur les exportateurs américains, en particulier les petites et moyennes entreprises (9).

Dans le secteur agricole, les deux parties travailleront à simplifier les exigences sanitaires pour les produits américains, notamment le porc et les produits laitiers.  Ces annonces semblent toutefois en décalage avec la position exprimée par plusieurs ministres de l’Agriculture des États membres de l’UE. En effet, lors des discussions précédentes, les représentants de la Commission avaient clairement indiqué que la réglementation européenne en matière de normes applicables aux produits constituait une ligne rouge à ne pas franchir dans le cadre des négociations commerciales, en particulier avec les États-Unis (10).

L’accord prévoit également une coopération renforcée en matière de sécurité économique, notamment pour sécuriser les chaînes d’approvisionnement, encourager l’innovation et coordonner les contrôles sur les investissements, les exportations et la lutte contre la fraude douanière.

Enfin, l’UE s’engage à investir, d’ici 2029, 600 milliards de dollars dans l’économie américaine, et effectuer des achats des produits énergétiques pour 750 milliards de dollars sur les trois prochaines années, afin de remplacer le gaz et le pétrole russes.

L’UE s’engage également à acheter des équipements militaires américains, ce qui pourrait sembler incohérent vu les efforts annoncés dans le cadre du programme « Defence Readiness Omnibus » de soutien aux entreprises européennes du secteur (11).

Un accord politique sans cadre juridique ?

Dans le cadre régulier des négociations de partenariats commerciaux, la Commission européenne est chargée de négocier le texte des accords. Selon qu’il s’agit d’un accord relevant de la compétence exclusive de l’Union ou d’un accord mixte, le processus législatif diffère.

Pour les accords relevant de la compétence exclusive de l’UE, la Commission négocie et signe l’accord, qui doit ensuite être approuvé par le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen (12).
En revanche, en présence d’un accord mixte, une ratification par les parlements nationaux des États membres est requise, sans pour autant empêcher une application provisoire de certaines dispositions (13).

La présidente de la Commission européenne a précisé que « l'accord politique du 27 juillet 2025 n'est pas juridiquement contraignant et que parallèlement aux actions immédiatement engagées, l'Union européenne et les États-Unis poursuivront les négociations, conformément à leurs procédures internes applicables, afin de mettre pleinement en œuvre l'accord politique,” sans que l’on sache à ce stade quel processus législatif s’appliquera.

Il apparaît qu’en l’absence d’un accord juridique il faille, semble-t-il, se contenter dans l’immédiat des « Executive Orders » publiés de manière unilatérale outre-Atlantique, en attendant la mise en œuvre juridique de l’accord.

Ajoutons néanmoins que, le 28 mai dernier, le Tribunal de commerce international des États-Unis a rendu une décision majeure en annulant les droits de douane imposés par l’administration américaine en vertu de l’« International Emergency Economic Powers Act » (IEEPA), et notamment les tarifs dits réciproques. La Cour a jugé que l’IEEPA ne permettait pas au Président d’imposer unilatéralement des tarifs douaniers sans autorisation claire du Congrès. Le gouvernement américain a immédiatement interjeté appel devant la Cour d’appel du circuit fédéral (CAFC), qui a accordé, le 29 mai, une suspension administrative temporaire de la décision du tribunal, maintenant les droits de douane additionnels jusqu’à ce qu’elle examine l’affaire. Le 31 juillet la Cour a entendu les arguments des parties, néanmoins aucun jugement n’a encore été rendu. 

Autres développements

Après l’aluminium et l’acier, le cuivre dans le viseur

Dans le prolongement de ces actions, le 30 juillet 2025, le président Trump a signé une proclamation ajustant les importations de cuivre aux États-Unis. La proclamation impose des droits de douane universels de 50 % sur les importations de produits semi-finis en cuivre (tels que les tuyaux, fils, barres, feuilles et tubes en cuivre) ainsi que sur les produits dérivés riches en cuivre (tels que les raccords de tuyauterie, câbles, connecteurs et composants électriques), à compter du 1er août (14).

Vers la fin de la franchise de minimis ?

Enfin, dans la continuité des mesures prises par le président Trump, un « Executive Order » a été signé le 30 juillet 2025, suspendant la franchise de minimis pour tous les pays (15).

Jusqu’ici, cette franchise, largement utilisée dans le secteur de l’e-commerce, permettait d’importer aux États-Unis des marchandises d’une valeur maximale de 800 USD par jour et par importateur en exemption de droits de douane.

Cette mesure, dont l’entrée en vigueur est prévue pour le 29 août 2025, fait suite à des suspensions de franchise déjà appliquées à certains pays (notamment la Chine, Hong Kong, le Mexique et le Canada) et s’inscrit dans un contexte de lutte contre les trafics illicites (notamment de Fentanyl).

Comment anticiper l’impact de ces mesures sur son activité ?

Dans un contexte marqué par la volatilité du commerce international et l’évolution rapide de la réglementation douanière, il est impératif pour les entreprises de faire preuve d’une vigilance accrue et d’une grande agilité afin de limiter les risques.

Il devient ainsi essentiel de procéder à une analyse approfondie de la chaîne d’approvisionnement et de distribution, dans le but d’identifier les zones de vulnérabilité et d’anticiper les conséquences des mesures actuellement en vigueur, tout en tenant compte des évolutions possibles des politiques commerciales des deux côtés de l’Atlantique.

La priorité doit également être accordée à l’évaluation minutieuse de l’accord en place, ainsi qu’à l’examen détaillé des précisions apportées par les autorités américaines, notamment en ce qui concerne les exemptions, afin d’adapter efficacement la stratégie et de saisir les opportunités tout en se prémunissant contre d’éventuelles contraintes.


[1] Déclaration à la presse de la Présidente von der Leyen « à propos de l'accord sur les droits de douane et le commerce avec les États-Unis , » en date du 27 juillet 2025.

[2] Executive Order, “IMPLEMENTING THE GENERAL TERMS OF THE UNITED STATES OF AMERICA-UNITED KINGDOM ECONOMIC PROSPERITY DEAL,” en date du 16 juin 2025.  

Fact Sheet, “Fact Sheet: President Donald J. Trump Secures Unprecedented U.S.–Japan Strategic Trade and Investment Agreement,” en date du 23 juillet 2025.  

Fact Sheet, “The United States and Indonesia Reach Historic Trade Deal,” en date du 22 juillet 2025.

[3] Ministry of Commerce, Press Releases China-US economic and trade talks held in Stockholm, Sweden”, 30 juillet 2025. 

[4] Executive Order, “Further Modifying the reciprocal tariff rates, en date du 31 juillet 2025

[5] Executive Order  “MODIFYING RECIPROCAL TARIFF RATES TO REFLECT TRADING PARTNER RETALIATION AND ALIGNMENT” en date du 9 avril 2025.

[6] Les produits ne faisant pas l’objet d’une taxation additionnelle à ce jour ne sont, bien entendu, pas concernés par les 15% qui ne s’appliqueront que si des droits étaient imposés dans le futur - Questions et réponses « Explication de l’accord commercial conclu entre l’Union européenne et les Etats-Unis », 29 juillet 2025

[7] Déclaration à la presse de la Présidente von der Leyen « à propos de l'accord sur les droits de douane et le commerce avec les États-Unis », 27 juillet 2025

[8] Fact sheet: The United States and European Union Reach Massive Trade Deal, 28 juillet 2025

[9] Fact Sheet: The United States and European Union Reach Massive Trade Deal, 28 juillet 2025

[10] Principaux Résultats du Conseil “Agriculture et pêche”, 23-24 juin 2025

[11] Defense Readiness Omnibus Factsheet, 17 juin 2025

[12] Article 207 du Traité sur l’Union européenne et du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (2016/C 202/01)

[13] Article 218 du Traité sur l’Union européenne et du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (2016/C 202/01)

[14] Proclamation du Président américain, 30 juillet 2025

[15] Executive Order du Président américain, 30 juillet 2025

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