Dans le cadre de ses activités, une banque souscrit des contrats d'option pour couvrir des positions prises sur des actions. Ces opérations étaient par conséquent soumises aux dispositions de l’article 38, 6-3° du CGI (ndlr : en présence de positions symétriques, cet article limite la déduction des pertes sur une position à la fraction qui excède les « gains non encore imposés » sur la position inverse).
Un litige opposait cette banque à l’administration fiscale sur la question de savoir si la détermination des « gains non encore imposés » d’un contrat d’option supposait de soustraire aux marges bénéficiaires latentes de ces contrats le montant des primes versées lors de leur souscription. Une telle soustraction réduirait « les gains non encore imposés » des contrats d’option, majorant ainsi la partie fiscalement déductible des pertes (en l’espèce latentes, constatées par voie de provision) sur les valeurs mobilières en sens inverse. Saisi de cette question, le Conseil d’Etat (ndlr : voir CE 19 décembre 2019 n° 431066 et TA Montreuil 15 décembre 2016 n° 1506591 dans le même sens ; voir également CAA Versailles, 3e ch., 26 Mars 2019, n° 17VE00442 en sens inverse) précise que le montant des gains non encore imposés relatifs à l’exécution d’un contrat d’option ne s'établit pas sous déduction de la prime versée en contrepartie de l'acquisition de celui-ci.
La formation de renvoi se prononce également sur la question de l’exercice de rattachement des primes d’option versées, dont la société avait étalé la déduction sur la durée du contrat d’option.
La CAA de Versailles juge alors que la prime acquittée en contrepartie de la souscription d'une option :
Arrêt : lien
Cet arrêt de la cour administrative d’appel de Versailles marque « l’acte II » d’un contentieux portant sur la déductibilité fiscale des primes acquittées en contrepartie de l'acquisition de contrats d'option en matière d'impôt sur les sociétés.
L’acte I (cf. CE 19 décembre 2019, n° 431066) avait été l’occasion d’une précision inédite sur l’interprétation à retenir de la notion de « gains non encore imposées » en application de laquelle la déductibilité des pertes sur certains contrats financiers à terme en position symétrique peut être limitée (CGI, art. 38, 6, 3°). Défavorable au contribuable, et critiquée en raison notamment de ses motifs (voir notamment E. Dussau, « L’article 38 du CGI à l’épreuve des contrats financiers optionnels », Dr fisc., 2020, n° 26, étude 281 ; voir également M. Poncelet et T. Piazza, « Les articles 38, 6-1° et suivants du code général des impôts : une lecture critique d’un texte anachronique » ; RISF 2020/3, p. 26 et s.), cette solution est appliquée par la CAA de renvoi (§4).
L’ouverture d’un acte II avait été appelée de ses vœux par le rapporteur public sous la décision CE précitée, qui indiquait que la décision laisserait « dans l’ombre (à chaque jour suffit sa peine) la question supplémentaire du traitement fiscal de la prime d’option et de l’exercice de rattachement pour l’acheteur et le vendeur (…) débat qui pourra rebondir devant la cour de renvoi ».
Cette occasion a parfaitement été saisie tant par la cour de renvoi que par le contribuable qui invoquait sur le fondement du droit de compensation, une surimposition liée à la déduction des primes à l'échéance.
Rappelons que du point de vue de l’acquéreur de l’option, trois hypothèses pouvaient être envisagées :
Rappelons que cet arrêt a été rendu sous l’empire des anciennes règles comptables; les nouvelles règles offrent désormais dans le cadre des relations de couverture une option entre l’étalement et la déduction différée de la prime (règlement n° 2015-05 du 2 juillet 2015). Cet arrêt pourrait constituer l’épilogue de cette affaire (au 20 avril nous n’avons pas connaissance du dépôt d’un pourvoi) et invite en tout état de cause les contribuables à procéder à une revue détaillée de leurs pratiques fiscales en matière d’instruments financiers à terme.
Maud Poncelet, Avocat Associée, Tarek Afantrouss, avocat, et Théo Piazza.