Taxe foncière des établissements industriels

Etat des lieux six mois après la décision GKN Driveline du Conseil d’Etat

Dans une décision du 11 décembre 2020 saluée par l’ensemble des praticiens,  le Conseil d’Etat revenait sur sa jurisprudence de 2013 relative à la notion de biens d’équipements spécialisés au sein de la catégorie des établissements  industriels. Six mois après cette décision, force est de constater que sa mise en application par les juges du fond s’avère favorable aux entreprises qui ont donc tout intérêt à poursuivre les contentieux en cours ou à déposer des réclamations contentieuses. Attention toutefois, le succès de l’entreprise suppose de disposer d’un dossier solide permettant de justifier de manière incontestable de la nature de biens d’équipement spécialisés des immobilisations en cause.

Petit rappel sur le champ d’application de la taxe foncière  

Le champ d'application de la taxe foncière sur les propriétés bâties est défini en termes assez généraux par les articles 1380 et 1381 du CGI. 

Aux termes de l’article 1380 du CGI : « La taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés bâties sises en France à l'exception de celles qui en sont expressément exonérées par les dispositions du présent code. »

Il n’existe pas de définition légale de la propriété bâtie mais selon la doctrine administrative, pour qu'une imposition soit établie, il est nécessaire que les constructions remplissent certaines conditions à savoir : être fixées au sol à perpétuelle demeure et présenter le caractère de véritables bâtiments (BOI-IF-TFB-10-10-10, n°1). 

S’agissant de la première condition, l’administration précise que « la construction doit être reliée au sol de telle façon qu'il soit impossible de la déplacer sans la démolir. Tel est le cas si la construction repose sur des fondations ou une assise en maçonnerie ou en ciment » (BOI-IF-TFB-10-10-10, n°10). 

Pour la deuxième condition, le caractère de « véritable bâtiment » d’une construction  doit s’apprécier eu égard à sa nature, sa destination, son importance, son mode d'établissement et sa fixité. Toujours selon l’administration, « les bâtiments s'entendent, non seulement des fondations et de leurs appuis, des murs, des planchers, des toitures, des cheminées, quelles que soient leurs dimensions et caractéristiques, mais également des aménagements faisant corps avec eux » (BOI-IF-TFB-10-10-10, n°120).

La notion de propriété bâtie inclut ainsi les accessoires immobiliers de la construction qui font corps avec elle. Une fois encore il n’existe pas de définition légale ou même doctrinale de cette notion, l’administration se limitant à donner  seulement une liste indicative d’éléments et d’installations qu’elle considère comme des accessoires immobiliers de la construction. A titre d’exemple on peut citer : les appareils élévateurs destinés aux personnes (ascenseurs, escalators), la vitrerie et la miroiterie, les fermetures (portes et fenêtres), les éléments de  serrurerie, le carrelage, les revêtements de sol spéciaux, tapis de sol ou moquette directement collés sur la chape de ciment, les installations sanitaires, la plomberie, les équipements d'isolation phonique et thermique, la climatisation, le chauffage central ou à air et les cuves à mazout correspondantes, l’ électricité (compteurs, fils, prises, interrupteurs, appareils d'éclairage et postes transformateurs de courant), les installations téléphoniques, à l'exclusion des standards et postes d'appel…. (BOI-IF-TFB-10-10-10, n°150).

Selon l’article 1381 du CGI : « Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : 1°) Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation ; 2°) Les ouvrages d'art et les voies de communication […] ».

La notion de propriété bâtie inclut donc également certains éléments qui, bien que ne constituant pas à proprement parler des constructions, ont été intégrés dans le champ d’application de la taxe foncière par le législateur.  

Selon l’administration, les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions se caractérisent par i) leur nature : il doit s'agir d'ouvrages en maçonnerie, ce qui exclut par exemple, les pylônes métalliques, ii) leur importance : les biens de très faibles dimensions ne peuvent en général pas être qualifiés d’ouvrage en maçonnerie (l’administration cite pour exemple les dés en béton dans lesquels sont fixés des pylônes), iii) leur fixité : il est nécessaire que les biens soient fixés au sol à perpétuelle demeure (BOI-IF-TFP-10-10-20, n° 70).

L’administration précise dans ce même BOFIP que « les biens qui remplissent ces conditions sont imposables quelle que soit leur destination ou leur affectation et alors même qu'ils entrent dans un cycle de production, ou qu'ils ont le caractère de biens d'équipement spécialisés ».

De son côté, la jurisprudence a, au fil des années, élaboré différents critères permettant de définir les installations mentionnées à l’article 1381 du CGI. Une synthèse de ces critères figure dans les conclusions du rapporteur public Laurent Olléon sous plusieurs décisions du 23 décembre 2010 qui devaient se prononcer sur le caractère passible de taxe foncière de structures de stockage constituées de charpentes bâchées en aluminium et de poteaux ancrés au sol (CE 23 décembre 2010, n° 326049, Sté Migeon Immobilier et CE 23 décembre 2010, n° 326047 et 326048, Sté Pérou Plateforme). Ainsi, « il doit s'agir de constructions, cimentées ou non, elles doivent être fixées au sol, et elles ne doivent soit pas pouvoir être déplacées facilement, soit, dans le cas où elles sont démontables, pas avoir vocation à être déplacées ».

Enfin, et on en vient à ce qui nous intéresse plus particulièrement, l’article 1382, 11° du CGI dispose que : « Sont exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties : (...) 11°) les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés au 1° et 2° de l'article 1381 » (étant précisé que l’article 1382 du CGI fixe la liste des biens exonérés de taxe foncière).

Ces outillages, et autres installations et moyens matériels d’exploitation, autrement appelés biens d’équipements spécialisés, sont définis par la doctrine administrative  comme « des immobilisations qui sont intégrées, directement et matériellement dans le processus de fabrication, de transformation ou de manutention et servent spécifiquement à l’exercice de l’activité professionnelle » (BOI-IF-TFB-10-50-30, n° 170).

On s’en doute, eu égard aux enjeux financiers liés à une possible exonération en application de l’article 1382, 11° du CGI, la notion de biens d’équipements spécialisés à toujours donné lieu à des divergences d’interprétation entre l’administration et le contribuable. L’enjeu de cette classification s’est encore amplifié lors de l’instauration de la CFE en remplacement de l’ancienne taxe professionnelle. 

Une décision controversée 

C’est dans ce contexte que le Conseil d’Etat, appelé à se prononcer sur cette notion, a jugé, dans sa décision Les Menuiseries du Centre de 2013 (CE 25 septembre 2013, n° 357029, Les Menuiseries du Centre), que « les outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels mentionnés au 11° de l'article 1382 s'entendent de ceux qui participent directement à l'activité industrielle de l'établissement et sont dissociables des immeubles ». 

L’affaire portait sur le cas d’une société qui exploitait un établissement industriel de fabrication de meubles et qui avait réclamé, sans succès, que soit exclus de sa base d’imposition des  aménagements de sécurité incendie consistant en une installation automatique d'extinction à eau, considérant que ces aménagements servaient spécifiquement à son activité et pouvaient donc bénéficier de l’exonération prévue à l’article 1382, 11° du CGI.  

Dans sa décision, le Conseil d’Etat a jugé que l'installation de lutte contre l'incendie dont disposait la société n'était pas spécifiquement adaptée au processus industriel mis en œuvre, pouvait être utilisée en cas d'affectation des locaux à d'autres activités et n'avait pas vocation à être démontée de l'immeuble auquel elle a été incorporée, autrement dit qu’elle n’était pas dissociable de l’immeuble. 

Dans cette décision pour le moins inattendue, le Conseil d’Etat a choisi, comme l’ont relevé de nombreux commentateurs, de redéfinir la notion de biens d’équipements spécialisés en ajoutant à un critère fonctionnel déjà existant (la participation directe à l’activité industrielle) un critère matériel (la dissociation de l’immeuble), qui n’était pas prévu par la loi ni d’ailleurs par la doctrine.  

Cette décision n’a pas manqué de susciter de nombreuses critiques de la part des praticiens dès lors qu’elle revenait à priver de portée l’exonération de l’article 1382, 11° du CGI. En effet, en pratique, il s’est avéré que, pour la très grande majorité des installations sur lesquelles portaient les litiges avec l’administration, la condition de dissociation de l’immeuble n’était quasiment jamais remplie. Les cours administratives d’appel, dans la stricte application de la jurisprudence Les Menuiseries du Centre, n’ont pu que rejeter les demandes des contribuables qui se réclamaient de l’article 1382, 11° pour exclure de leurs bases d’imposition à la taxe foncière des installations spécifiques à leur activité.  

En outre, nombreux ont été les commentateurs qui ont relevé l’incohérence de cette décision. En effet, l’approche du Conseil d’Etat revenait à ne faire bénéficier de l’exonération que des installations, situées en dehors du champ d’application de la taxe foncière puisqu’il était exigé que lesdites installations soient dissociables de l’immeuble dans lequel elles s’intégraient. Or, par définition une exonération ne peut concerner que des biens dans le champ d’application de cette taxe (on n’exonère pas des installations qui sont par définition non taxables). A cet égard, le renvoi par l’article 1382, 11° aux dispositions de l’article 1381 qui, on l’a vu, définissent le champ d’application de la taxe foncière, ne pouvait que souligner le caractère illogique de la décision.  

Un revirement de jurisprudence bienvenu 

Dans cet environnement, la décision GKN Driveline du 11 décembre 2020, (CE n° 422418, SA GKN Driveline) est apparu comme un revirement jurisprudentiel bienvenu, ouvrant la voie à de nouvelles possibilités de réclamation pour les entreprises.

Ainsi le Conseil d’Etat a-t-il tout d’abord énoncé que : Pour apprécier, […] la consistance des propriétés qui entrent, en vertu de ses articles 1380 et 1381, dans le champ de la taxe foncière sur les propriétés bâties, il est tenu compte, non seulement de tous les éléments d'assiette mentionnés par ces deux derniers articles mais également des biens faisant corps avec eux ».

Avant de préciser que : « Sont toutefois exonérés de cette taxe, en application du 11° de l'article 1382 du même code, ceux de ces biens qui font partie des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation d'un établissement industriel, c'est-à-dire ceux de ces biens qui relèvent d'un établissement qualifié d'industriel au sens de l'article 1499, qui sont spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un tel établissement et qui ne sont pas au nombre des éléments mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381. »

Le Conseil d’Etat a ainsi choisi, pour qualifier les biens relevant de l’article 1382, 11° d’abandonner le critère matériel qu’avait introduit la décision Les Menuiseries du Centre et de ne retenir que le seul critère fonctionnel, sous réserve que les biens respectent les trois conditions édictées par l’arrêt c’est-à-dire :

  • Relever d’un établissement industriel ;

  • Être spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d’être exercées dans un établissement industriel (et non plus participer directement à l’activité industrielle) ;

  • Ne pas être un bien mentionné aux 1° et 2° de l’article 1381.

Comme l’a souligné la rapporteure dans ses conclusions sous la décision GKN Driveline, l’abandon du critère matériel de dissociabilité aura mécaniquement pour effet d’attraire dans le champ de l’exonération, des biens qui, sous l’empire de l’ancienne jurisprudence, n’auraient pu en bénéficier. La rapporteure cite à titre d’exemples « les fours industriels utilisés pour le traitement thermique de certains produits ainsi que, selon leurs caractéristiques techniques et sous réserve de leur caractère spécifique, certaines installations électriques, de refroidissement ou de distribution d’air comprimé ou encore des monte-charges ».

S’agissant du critère fonctionnel, désormais seul retenu et notamment de la condition d’adaptation spécifique à l’activité susceptible d’être exercée dans un établissement industriel, on relèvera deux points particulièrement intéressants qui montrent que le Conseil d’Etat, par cette décision, n’a pas seulement entendu revenir à l’état de la jurisprudence avant Les Menuiseries du Centre, mais a également souhaité assouplir les critères définissant le champ d’application de l’article 1382, 11° du CGI. 

Tout d’abord, le Conseil d’Etat, dans ce nouvel arrêt, n’exige pas, à la différence de la jurisprudence Les Menuiseries du Centre, que les biens en cause participent directement à l'activité ou, comme l’indique la doctrine administrative précitée (BOI-IF-TFB-10-50-30, n° 170), qu’ils soient « intégrés, directement et matériellement dans le processus de fabrication, de transformation ou de manutention et servent spécifiquement à l’exercice de l’activité professionnelle. » Cette différence est de taille car elle signifie que l’exonération s’applique indépendamment du point de savoir si les biens en cause sont intégrés ou non dans un processus industriel de fabrication ou de transformation. Ce qui importe désormais c’est que le bien soit adapté à l’activité exercée . 

Sous l’empire de cette nouvelle approche, il ne fait pas de doute que les extincteurs industriels en litige dans l’affaire Les Menuiseries du Centre pourraient bénéficier de l’exonération alors même que dans le cadre de l’ancienne jurisprudence le Conseil d’Etat avait relevé, outre le fait qu’elles n’étaient pas dissociables, que lesdites installations ne participaient pas directement à l’activité et qu’ainsi elles ne pouvaient être considérées comme spécifique à l’activité. Cet assouplissement apparaît conforme à l’esprit du texte dés lors qu’il ne fait pas de doute qu’un système d’extincteur installé dans un atelier de menuiserie où le risque d’incendie est particulièrement important constitue bien une installation spécifiquement adaptée à l’activité exercée, quand bien même il ne serait pas intégré dans une chaîne de fabrication ou de montage. 

Par ailleurs, le Conseil d’Etat précise que l’exonération s’applique aux biens spécifiquement adaptés à l’activité susceptible d’être exercée dans un établissement industriel. Il n’est plus question, comme dans la jurisprudence Les Menuiseries du Centre «de biens qui participent à une activité industrielle » (fabrication ou transformation) mais d’une notion plus large qui correspond à la définition de l’établissement industriel désormais codifiée à l’article 1500 du CGI. Selon cet article, « Revêtent un caractère industriel les bâtiments et terrains servant à l'exercice d'une activité de fabrication ou de transformation de biens corporels mobiliers qui nécessite d'importants moyens techniques. Revêtent également un caractère industriel les bâtiments et terrains servant à l'exercice d'activités autres que celles mentionnées au premier alinéa du présent A qui nécessitent d'importants moyens techniques lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre est prépondérant. »

Ainsi, il ne fait pas de doute que l’application de la jurisprudence GKN Driveline ne sera pas limitée aux activités de nature purement industrielle mais concernera toutes les activités (logistique, entreposage…) susceptibles d’être exercées dans des locaux répondant à la définition d’établissement industriel.   

Enfin un dernier point ne doit pas être perdu de vue. Comme on l’a vu, le Conseil d’Etat a précisé dans sa décision GKN Driveline que les biens relevant des articles 1380 et 1381 du CGI incluent les bâtiments mais également des biens faisant corps avec eux. Si l’appréciation des éléments susceptibles de relever du 1° ou du 2° de l’article 1381 (c’est à dire des biens ne pouvant bénéficier de l’exonération de l’article 1382, 11°) devrait être assez aisée, en revanche le cas des biens faisant corps avec eux est susceptible de faire persister dans le futur certaines divergences d’interprétation entre l’administration et le contribuable.

On le voit, la décision GKN Driveline devrait donc redonner toute sa portée à l’article 1382, 11° du CGI et permettre d’envisager l’élargissement du champ de l’exonération. Précisons que ladite exonération pourra s’appliquer non seulement pour la détermination de l’assiette de la taxe foncière sur les propriétés bâties mais également  pour l’assiette de la CFE.  

La décision GKN Driveline a désormais vocation à être invoquée :

  • Dans le cadre des contrôles et des contentieux en cours : on rappelle qu’en cas de contrôle portant sur la CFE les entreprises disposent d’un délai spécifique de réclamation expirant le 31 décembre de la troisième année suivant celle de la proposition de rectification.  

  • Dans le cadre de réclamations contentieuses en dehors de toute procédure de redressement : les entreprises disposent pour ce faire d’un délai de réclamation expirant le 31 décembre de l’année suivant celle de la mise en recouvrement du rôle. L’intérêt de telles réclamations pour le passé se trouve certes limité à une année mais en cas de succès ce sont surtout les impositions futures qui seront impactées puisque l’exonération éventuellement accordée sera applicable aux impositions des années suivantes.   

  • Lors de la déclaration des bases d’imposition, en cas de constructions nouvelles ou d’extension d’établissements industriels

Les enseignements des décisions des juges du fond postérieures à l’arrêt GKN Driveline 

La décision du CE a certes été accueillie favorablement ; mais restait à connaître la position des juges du fond confrontés à une mise en application pratique de cette approche renouvelée de la notion de biens d’équipements spécialisés. 

Plus de six mois après la décision du Conseil d’Etat, de nombreuses cours administratives d’appel se sont d’ores et déjà prononcées, soit dans le cadre d’appel à la suite de décisions des tribunaux administratifs soit dans le cadre de renvoi intervenant à la suite de décisions du Conseil d’Etat. Ce dernier a également eu l’occasion de se prononcer sur la nature de divers biens. Les enseignements à tirer de ces décisions sont de deux ordres. 

On constate tout d’abord que l’application de la nouvelle définition a conduit les juges à appliquer l’exonération de l’article 1382, 11° du CGI à de nombreux biens qui, sous l’empire de l’ancienne jurisprudence ne pouvaient en bénéficier du seul fait de l’absence de dissociabilité. On peut citer à titre d’exemples : pour un établissement de fabrication de produits alimentaires, le réseau d’air comprimé, l’évaporateur de la chambre froide (CAA Nantes, 1er avril 2021, 18NT03114) ; pour un établissement de fabrication de nuanciers de peinture, le système de chauffage de ventilation et de climatisation permettant extraire les solvants de l’air, le monte-charge (CAA Nantes, 1er avril 2021, 18NT00758) ; pour une carrière,  les frais de découverte, les frais de clôture, (CAA Nantes 1er avril 2021, 19NT02201 et 19NT02202) ; pour une usine de traitement des métaux,  un transformateur électrique de grande puissance (CE 16 avril 2021, n° 432786) ; pour un centre de tri et d’enfouissement de déchets, les portails de sécurité,  les tubes et tuyaux servant à la collecte et au traitement des eaux usées, les bassins de décantation, les travaux électriques (CAA Nantes 1er avril 2021, n° 19NT02198) ; pour une usine de fabrication de transmission pour des tracteurs, les tuyauteries industrielles (CAA Douai 18 mars 2021, n° 18DA02652). 

Ces décisions favorables aux entreprises confirment l’attente des praticiens qui anticipaient l’élargissement du champ d’application de l’exonération. 

Le second constat qui peut être dressé à la lecture de ces décisions est que le juge, s’il est favorable à l’élargissement de l’exonération, se montre particulièrement exigeant quant à la justification du caractère de biens d’équipements spécialisés. Ainsi de nombreuses décisions rejettent les demandes des contribuables faute de preuve suffisante apportée par ces derniers quant au caractère spécifique du bien en cause vis-à-vis de l’activité exercée dans l’établissement. Ainsi de travaux de climatisation, d’électricité ou de chauffage ou encore des systèmes d’alarme incendie n’ont pas été admis comme des biens spécifiques en l’absence de justificatifs tangibles. S’agissant de ce type de biens, on constate que les juges s’attachent à obtenir la démonstration que ces éléments ne correspondent pas à des installations standards, non spécifiques à des établissements industriels.  

On ne peut donc que recommander aux contribuables qui souhaiteraient s’engager dans un processus de réclamation contentieuse de disposer de solides éléments permettant de démontrer que les biens dont l’exonération est demandée sont, d’une part spécifiques à l’activité exercée et, d’autre part, ne constituent pas des biens mentionnés aux 1° et 2° de l’article 1381 du CGI ou faisant corps avec eux. A cet égard, les éléments de preuve nous paraissent pouvoir être de toute nature qu’il s’agisse de factures, de devis, de photographies ou encore, dans le cas d’activités soumises à des règles spécifiques en matière de sécurité (établissements Seveso par exemple), de l’arrêté préfectoral définissant les obligations de l’entreprise. 

La décision GKN Driveline a incontestablement ouvert la voie à un élargissement du champ d’application de l’article 1382, 11° du CGI. Elle devrait donc contribuer à l’avenir réduire l’insécurité juridique qui s’attachait à la détermination des bases d’imposition à la taxe foncière et à la CFE des entreprises. Couplée à la baisse engagée de la taxe foncière des établissements industriels à compter de 2021, cette décision est de nature à permettre d'atteindre l’objectif annoncé de restauration de la compétitivité des entreprises industrielles.

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Valérie Aelion

Valérie Aelion

Avocat, Directeur, PwC Société d'Avocats

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