Crédit d’impôt recherche : les apports majeurs des dernières modifications législatives et doctrinales

L’année 2021 a été riche en changements en matière de Crédit d’Impôt Recherche (« CIR »).

D’importants ajouts et précisions ont en effet été apportés successivement par la loi de finances pour 2021, le décret n° 2021-784 du 18 juin 2021 et une nouvelle version de la doctrine administrative en date du 13 juillet 2021.

Nous revenons ici sur les principaux apports de ces récentes modifications.

1. Définition des activités de R&D éligibles - BOI-BIC-RICI-10-10-10-20

Recherche et Développement

Outre les catégories d’activités déjà recensées par le BOFiP (recherche fondamentale, recherche appliquée et développement expérimental), l’administration fiscale s’approprie la définition du Manuel de Frascati (2015) de l’OCDE, référence méthodologique internationale pour la définition du périmètre des activités de R&D. Elle exige ainsi désormais la réunion de cinq critères cumulatifs pour qualifier une opération de R&D au sens du régime du CIR : celle-ci doit comporter un élément de nouveauté (1), de créativité (2) et d’incertitude (3), être systématique (4) et être transférable et/ou reproductible (5).

Développement expérimental

La définition des activités de développement expérimental est également modifiée sur le modèle de celle proposée par le Manuel de Frascati. Celles-ci désignent des travaux systématiques qui produisent de nouvelles connaissances techniques, visant à créer ou améliorer les produits et procédés existants, étant précisé que le développement expérimental constitue seulement une étape du développement de produits qui prend fin au moment où les critères de la R&D ne sont plus applicables.

Etat des techniques existantes

Jusqu’à la mise à jour de sa doctrine, l’administration fiscale exigeait des entreprises réalisant des opérations de R&D qu’elles lui présentent un état de l’art accessible dès l’origine des travaux de R&D.

Désormais, il est demandé de réaliser une recherche bibliographique ainsi qu’une analyse détaillée des approches théoriques ou pratiques existantes. Deux situations se présentent selon que le problème posé dispose ou non d’une solution. En l’absence de solution, l’administration considère qu’il s’agit d’un verrou scientifique nécessitant l’engagement d’une opération de R&D. A l’inverse, si des solutions sont identifiées, les travaux entrepris doivent être qualifiés d’ingénierie et ne sont pas éligibles au CIR.

Activités connexes et exemples

Les développements relatifs aux activités connexes font maintenant l’objet d’un BOFiP dédié au BOIBIC- RICI-10-10-10-25. L’administration fiscale reprend une fois de plus des extraits du Manuel de Frascati pour établir une distinction entre, d’une part, les notions de R&D et d’innovation et, d’autre part, la R&D et les activités connexes.

Elle propose également, au travers d’un schéma illustratif issu du guide du CIR édité par le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (« MESRI »), une démarche permettant d’identifier des opérations de R&D dans le développement d’un projet d’entreprise.

Par ces diverses modifications qui se réfèrent expressément au Manuel de Frascati ainsi qu’au guide du MESRI, l’administration souhaite ainsi accorder une place plus importante à la pratique développée par les professionnels de la science et de l’innovation.

2. Dépenses de personnel - BOI-BIC-RICI-10-10-20-20

Intérimaires

La doctrine administrative consacre la possibilité de retenir, au titre des dépenses éligibles, les dépenses afférentes aux intérimaires « dès lors qu’ils sont des personnels de recherche directement et exclusivement affectés aux opérations de R&D », i.e. qu’ils exercent des activités éligibles dans le cadre de projets eux-mêmes éligibles.

A cet égard, l’administration indique que seules sont prises en compte dans l’assiette du CIR les rémunérations et les charges sociales, à l’exclusion des frais indirects (frais de gestion de personnel, d’administration générale).

Cette précision soulève la question de la méthode de valorisation à retenir pour ces dépenses, notamment lorsque l’entreprise qui bénéficie du CIR ne dispose pas du détail des charges sociales patronales pour les intérimaires dans la mesure où il s’agit de personnels dont elle n’est pas l’employeur. Des précisions à ce sujet seraient bienvenues.

Cotisations patronales

L’administration fiscale a également procédé à l’actualisation de la liste des cotisations patronales éligibles au sein desquelles figure désormais la contribution exceptionnelle temporaire (CET) versée à l’Agirc.

3. Dépenses de recherches externalisées - BOI-BIC-RICI-10-10-20-30

Organismes de recherche publics

La loi de finances pour 2021 a modifié, à compter du 1er janvier 2022, les modalités de prise en compte des dépenses externalisées auprès d’organismes de recherche publics. Ceux-ci devront désormais être titulaires d’un agrément délivré par le MESRI (les conditions et durée de cet agrément sont fixées à l’article 49 septies H de l'annexe III au CGI par le décret n° 2021-784 du 18 juin 2021 et son arrêté conjoint). De plus, les dépenses afférentes aux opérations qui leur seront confiées ne seront plus prises en compte pour le double de leur montant et le plafond de droit commun de 10 millions d’euros leur sera applicable (suppression du plafond majoré à 12 millions d’euros).

Sous-traitance en cascade

Le BOFiP encadre désormais la sous-traitance en cascade en précisant que la quote-part des dépenses afférentes à des travaux réalisés par des sous-traitants de rang 3 n’est pas éligible au CIR pour le donneur d’ordre. Afin de sécuriser ce dernier, l’administration suggère d’établir des factures comportant des éléments d’information sur les sous-traitants de rang 2 qui sont intervenus et sur la quote-part du montant facturé correspondant aux travaux qu’ils auront réalisés.

Nature des dépenses éligibles

L’administration précise que, pour être éligibles au titre de dépenses de recherches externalisées, les dépenses engagées doivent être afférentes à de véritables opérations de R&D nettement individualisées dont la réalisation est, soit confiée complètement à un organisme de recherche tiers (recherche contractuelle), soit menée dans le cadre d’une collaboration de recherche avec cet organisme.

En outre, le BOFiP consacre la décision « FNAMS » (CE 22 juillet 2020 n° 428127) dans laquelle le Conseil d’Etat a reconnu la possibilité pour l’entreprise donneuse d’ordre d’inclure dans l’assiette de son CIR les dépenses de travaux scientifiques et techniques externalisés, qui ne constituent pas en tant que tels des opérations de R&D, mais qui sont indispensables à la réalisation d’une opération de R&D éligible au CIR qu’elle mène en interne.

4. Subventions et sociétés agréées au CIR BOI-BIC-RICI-10-10-30-20

Prêt à taux zéro Innovation

Les « PTZI » distribués par Bpifrance sont assimilés à un financement public de projets de recherche et doivent ainsi être pris en compte dans la base de calcul du CIR selon les mêmes modalités que celles applicables aux subventions remboursables.

Sociétés agréées au CIR

L’administration se rallie à la décision « Société Takima » (CE 9 septembre 2020 n° 440523) par laquelle le Conseil d’Etat a mis fin à un débat de longue date sur les modalités de calcul du CIR des sociétés agréées, considérant que les organismes qui réalisent des opérations de recherche pour le compte de tiers doivent exclure de la base de calcul de leur propre CIR les dépenses éligibles exposées pour la réalisation de ces opérations, et non déduire les sommes reçues du donneur d’ordre.

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