Focus sur le crédit d'impôt en faveur de la recherche collaborative

Un crédit d’impôt pour compenser la réforme du crédit d’impôt recherche

La Loi de finances pour 2021 a supprimé, pour les dépenses exposées à compter du 1er janvier 2022, le dispositif de doublement des dépenses externalisées auprès d’organismes publics et assimilés pour la détermination de l’assiette de calcul du Crédit d’Impôt Recherche (« CIR »).  L’objectif affiché était de mettre en conformité le droit français avec le droit européen de la concurrence.

Par ailleurs, l’article 69 de la Loi de finances pour 2022 a instauré un nouveau Crédit d’impôt en faveur de la recherche Collaborative (« CICo ») au titre des dépenses exposées entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2025 au sein de l’UE ou de l’EEE dans le cadre de contrats de collaboration conclus avec des Organismes de Recherche et de Diffusion des Connaissances (“ORDC”).

Ce faisant, l’objectif du législateur était de soutenir les partenariats privés-publics, en compensant la suppression du régime de sous-traitance publique du CIR, ainsi que la recherche française, par le biais de la recherche partenariale.

Conditions d’application

Les contrats de collaboration ont pour objet le portage commun de projets de recherche par une entreprise et par un ou plusieurs organismes de recherche. Ils reposent sur un partage des risques et des résultats liés au projet et se distinguent de la sous-traitance « classique » en ce qu’ils établissent un partage des coûts, mais ne donnent pas lieu à la facturation d’une marge commerciale.

Pour bénéficier du crédit d’impôt en faveur de la recherche collaborative, le contrat, conclu préalablement à l’engagement des travaux et à compter du 1er janvier 2022, doit notamment prévoir :

  • l’objectif commun poursuivi, 
  • la répartition des travaux entre l’entreprise et l’ORDC,
  • les modalités de partage des risques et des résultats,

  • la facturation des dépenses de recherche par les organismes à leur coût de revient,

  • le droit de publication des résultats pour l’ORDC.

L’ORDC doit également supporter au moins 10 % des dépenses de recherche exposées. De plus, il ne doit pas y avoir de lien de dépendance entre l’ORDC et la société avec laquelle sont réalisés les travaux de recherche.

Pour pouvoir être qualifiée d’ORDC, l’entité (qui peut être publique ou privée), doit remplir plusieurs critères (qui se recoupent en partie avec ceux applicables dans le cadre du CIR) :

  • Son objectif premier est d’exercer en toute indépendance des activités de recherche ou de diffuser les résultats de cette recherche (enseignement, publications, transfert de connaissances) ;

  • En cas d’exercice d’activités économiques, le financement, les coûts et les revenus de ces activités doivent être comptabilisés séparément. Les activités économique et non économique doivent consommer les mêmes intrants (matériel, main d’œuvre, capital immobilisé). La capacité affectée à ces activités économiques ne doit pas excéder 20 % de la capacité annuelle globale de l’entité ;

  • Elle doit être située et réaliser directement les travaux au sein de l’Espace Economique Européen, ou par dérogation, faire appel à d’autres ORDC selon les mêmes conditions, lorsque cela est prévu au contrat ;

  • Un agrément doit être obtenu auprès du Ministère chargé de la Recherche, de l’Enseignement Supérieur et de l’Innovation (« MESRI »), cf. infra.

Calcul et utilisation du CICo

Le crédit d’impôt est égal à 40 % (50 % pour les PME « communautaires ») des sommes facturées par les ORDC, dans la limite d’un plafond de 6 millions d’euros par an. L’imputation du crédit d’impôt, l’utilisation de son éventuel excédent ainsi que son remboursement s'opèrent dans les mêmes conditions que pour le CIR.

Les PME « communautaires » au sens du droit européen sont les entreprises qui emploient moins de 250 salariés et qui, soit réalisent un chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 50 millions d’euros, soit disposent d’un total de bilan annuel n’excédant pas 43 millions d’euros. 

Attention toutefois : les dépenses en cause ne peuvent pas être retenues pour le calcul du CIR ou de tout autre crédit d’impôt si elles sont prises en compte dans la base de calcul du CICo. Par ailleurs, le seuil annuel de 100 millions d’euros de dépenses, qui détermine le taux du CIR applicable, sera désormais apprécié en tenant compte des dépenses ouvrant droit au CICo (art. 244 quater B, I modifié du Code général des impôts).

Pour rappel, au-delà de 100 millions d’euros de dépenses annuelles, le taux du CIR diminue de 30 % à 5 %.

Contrôle du CICo

Les modalités de contrôle du CICo sont identiques à celles du CIR.

Les litiges portant sur ce crédit d’impôt pourront être portés devant le comité consultatif du CIR et les entreprises pourront solliciter un rescrit spécifique ou un contrôle sur demande dans les mêmes conditions que pour le CIR.

Précisions apportées par le décret n° 2022-1006 du 15 juillet 2022

Le décret susvisé a apporté des précisions sur les points suivants :

  • L’éligibilité au CICo des opérations de recherche scientifique ou technique est calquée sur celle du CIR. Sont donc sont visées la recherche fondamentale, la recherche appliquée et le développement expérimental.

  • La demande d'agrément des ORDC doit être déposée auprès du MESRI et contient l’agrément CIR et un formulaire complété permettant au MESRI de reconnaître la qualité d’ORDC.

L’agrément CICo est accordé pour une durée de 3 ans (années civiles), ou pour la durée restant à courir avant la fin de validité de l’agrément au titre du CIR si elle est inférieure. Cet agrément peut être retiré si l’organisme ne remplit plus les conditions de qualification d’ORDC.

La date limite de dépôt de la demande d’agrément CICo a été fixée de la manière suivante :

  • le 31 mars pour une première demande (par exception, le 30 septembre 2022 pour une première demande d’agrément au titre de 2022) ;

  • à la fin de la dernière année d’agrément pour un renouvellement.

  • En ce qui concerne le contrat de recherche partenariale, le décret précise que le seuil de 10 % de dépenses minimales supportées par les ORDC doit être calculé en effectuant le rapport entre les dépenses de recherche effectivement supportées par ces ORDC et le total des dépenses de recherche exposées par l’ensemble des parties pour la réalisation des opérations de recherche prévues au contrat de collaboration.

  • S’agissant des modalités de calcul du CICo, le calcul est effectué par référence aux dépenses facturées au cours de l’année civile (sans que la date de clôture de l’exercice ou sa durée ne soit prise en compte).

  • Enfin la déclaration de CICo devra être effectuée sur un formulaire spécifique déposé en même temps que le relevé de solde pour les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés (ou de la déclaration de résultat pour les autres).

Premiers retours d’expérience 

La fin du doublement des dépenses de sous-traitance publique dans le cadre du CIR ne devrait pas être compensée par le CICo. D’une part, parce que les contrats de collaboration ne représentent qu’une part limitée des contrats conclus entre les entreprises et les organismes publics et que ceux-ci peuvent en outre avoir été signés avant le 1er janvier 2022, donc être non éligibles au nouveau dispositif. Ensuite, parce que le taux du CICo est seulement de 40 % des dépenses engagées, alors que le taux effectif pour le CIR était de 60 %.

Les entreprises devront s’assurer de demander à leurs sous-traitants un agrément CIR préalable à toute collaboration puisqu’il s’agit d’un prérequis indispensable à l’agrément ORDC. Ce prérequis sera évidemment plus facile à obtenir pour les entités publiques « automatiquement » agréées, en comparaison avec les entités privées pour lesquelles un dossier d’agrément CIR complet devra être déposé.

Enfin, concernant le contrat de collaboration, il ressort de notre expérience que les critères attendus dans le cadre du nouveau régime du CICo ne sont pas toujours respectés (répartition des travaux, facturation au coût de revient…). Lors de la mise en place de ces contrats, une attention particulière doit impérativement être portée à l’élaboration des clauses relatives aux critères prévues par la loi, afin de ne pas risquer de se placer en marge du régime du CICo. En cas d’intervention de tiers (autres ORDC ou autres sociétés), il pourra être également utile de prévoir spécifiquement dans le contrat que les frais afférents à cette participation devront être clairement identifiés au moment de la facturation.


Pour aller plus loin

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Rémi Montredon

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Avocat, Associé, PwC Société d'Avocats

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