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Pilier 1 – Montant B – La position française précisée par l’administration

Administration fiscale
  • Publication
  • 25 juil. 2025

La Direction de la législation fiscale a publié le 23 juillet 2025 une instruction administrative (BOI-BIC-BASE-80-10-50), précisant la position française à l’égard du Montant B. Pour mémoire, le Montant B, issu des travaux réalisés dans le cadre du Pilier 1 de la réforme de la fiscalité internationale initiée par l’OCDE, vise à proposer une « approche simplifiée » de l’application du principe de pleine concurrence aux activités de distribution et de marketing de routine. Désormais intégrée en tant qu’annexe aux Principes directeurs de l’OCDE, l’ « approche simplifiée » permettrait à nombre de groupes multinationaux de se référer à des taux de marge opérationnelle standard plutôt que de recourir aux benchmarks pour justifier de la conformité des prix de transfert réalisés par leurs filiales de distribution BtoB. 

 

A ce stade, la disparité des positions prises par les Etats vis-à-vis de l’« approche simplifiée » place les groupes dans l’incertitude. A court terme, la possibilité pour les groupes de se reposer uniquement sur l’ « approche simplifiée » devrait demeurer limitée, la France confirmant comme d’autres pays qu’elle ne la mettra pas en œuvre en droit interne à brève échéance, au-delà de l’engagement politique à en respecter le résultat lorsqu’elle sera appliquée dans certaines « juridictions à faible capacité ». 

Les règles du Montant B, que nous commentions de manière détaillée dans un précédent article auquel nous renvoyons le lecteur, sont cristallisées depuis la publication par l’OCDE du Rapport Pilier 1 – Montant B le 19 février 2024, auquel renvoie l’instruction récemment publiée par l’administration française. Ce rapport a été complété le 17 juillet 2024 d’orientations complémentaires visant à définir les juridictions éligibles à certaines règles dérogatoires et les juridictions couvertes par l’engagement politique précité. Enfin, le Cadre Inclusif OCDE/G20 a publié un Modèle d'accord entre autorités compétentes pour faciliter la mise en œuvre du Montant B le 23 septembre 2024. L’ensemble de ces publications ont fait l’objet d’un Rapport consolidé sur le Montant B publié le 24 mars 2025 par l’OCDE.

En substance, l’ « approche simplifiée » vise les transactions réalisées par certaines entités de distribution qui s’approvisionnent auprès d’une ou de plusieurs entreprises étrangères liées aux fins de la revente en gros à des clients tiers. Sont notamment exclues les transactions concernant des biens incorporels, des services ou des matières premières, ainsi que les activités de vente au détail lorsqu’elle représentent au moins 20 % du chiffre d’affaires de l’entité de distribution. Seules les activités de distribution de routine pouvant être testées de manière fiable par la méthode transactionnelle de la marge nette sont visées, ce qui implique que le distributeur ne supporte pas de risques économiques significatifs ni ne dispose d'incorporels uniques et de valeur. D’autres critères quantitatifs limitent son champ d’application.

L’ « approche simplifiée » repose sur une matrice de prix élaborée par l'OCDE sur la base d'un benchmark mondial de données d'entreprises. Cette matrice prévoit 15 taux standard de marge opérationnelle, compris entre 1,5 % et 5,5 %, pouvant être appliqués avec une flexibilité de +/– 0,5 %. Le taux applicable est sélectionné en fonction du secteur d’activité dans lequel le distributeur évolue et de certains ratios financiers. La marge opérationnelle cible fait dans certains cas l’objet d’ajustements, en fonction du niveau des dépenses opérationnelles du distributeur ou du pays dans lequel il est implanté.

Cette « approche simplifiée » ne sera pas obligatoirement mise en œuvre par l'ensemble des pays membres du Cadre Inclusif, ces derniers pouvant choisir de la traduire ou non dans leur droit interne depuis le 1er janvier 2025. Les pays qui décideront de l'adopter pourront par ailleurs choisir entre rendre l'« approche simplifiée » optionnelle pour les contribuables, ou la rendre obligatoire.

La France a déjà indiqué qu’elle ne mettrait, à ce stade, pas en œuvre l’ « approche simplifiée » dans son droit interne, se limitant à son engagement à en respecter le résultat si elle était mise en œuvre par certaines « juridictions à faible capacité ». Un certain nombre de pays, tels que l’Australie, la Nouvelle-Zélande, les Pays-Bas, l’Allemagne ou le Japon ont déjà fait le même choix, publiant des instructions administratives en ce sens.

A l'inverse, les Etats-Unis avaient annoncé en décembre 2024 que l’ « approche simplifiée » serait applicable à l'égard des entreprises américaines éligibles, sur une base optionnelle, à compter du 1er janvier 2025. Une instruction administrative précisant les modalités d’application est toujours attendue, dans un contexte politique local incertain. Le Mexique, qui avait manifesté son intérêt pour le Montant B pourrait l’introduire dans son droit interne d’ici la fin de l’année.

Au cas général, un Etat n'ayant pas opté pour l'« approche simplifiée » n’est pas contraint par le choix formulé par l'Etat de la contrepartie de l'adopter. Les éventuels litiges générant une double imposition devront classiquement être résolus par voie de procédure amiable réglée sur la base des Principes directeurs généraux.

Toutefois, les 145 pays membre du Cadre Inclusif s'engagent à respecter le résultat obtenu par application de l' « approche simplifiée » par une entité située dans une « juridiction à faible capacité » qui aurait choisi quant à elle d’opter pour le Montant B.

L’instruction publiée par l’administration française le 23 juillet 2025 confirme que la France respectera cet engagement et prendra les mesures appropriées pour éviter la double imposition qui pourrait résulter de l’application unilatérale du Montant B dans ces juridictions, sous les 3 conditions cumulatives suivantes :

L’administration précise qu’au 30 juin 2025, aucune juridiction ne remplissait encore ces conditions.

L’instruction confirme par ailleurs que « l’option d’appliquer le Montant B par un pays qui n’est pas à faible capacité est sans incidence sur les transactions entre ce pays et la France ». Ainsi concrètement, les transactions avec tout autre pays devront continuer à faire l’objet de benchmarks justifiant de la correcte application du principe de pleine concurrence aux activités de distribution de routine.

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