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Cass. Com. 11 mai 2023 n°21-16.900, Prime Video Limited
Sur le fondement de l’art. L. 16 B du LPF, un juge des libertés et de la détention (JLD) autorise l’administration à effectuer des visites et des saisies dans différents locaux de contribuables et de sociétés en vue de rechercher la preuve de fraudes fiscales commises par des sociétés étrangères et par leur dirigeant.
Au cours de l’une des visites, les agents de l’administration, constatant des connexions régulières à des comptes bancaires en ligne de banques étrangères demandent au contribuable présent de leur donner accès à ces comptes protégés par un "login" et un mot de passe dès lors que ces informations bancaires entrent dans le champ de l'autorisation de visite. Le contribuable communique ces informations sans que le procès-verbal de visite ne mentionne qu’il a été informé de la nécessité d’obtenir son consentement pour recueillir lesdites informations.
Le contribuable forme un recours contre l’ordonnance du JLD.
Le juge d’appel rejette ce recours.
La Cour de cassation relève que :
En vertu de l’art. L. 16 B, III bis du LPF, les agents des impôts peuvent recueillir, sur place, des renseignements et justifications concernant les agissements du contribuable auprès de l’occupant des lieux visités ou de son représentant et, s’il est présent, du contribuable lui-même, à condition de les avoir informés que leur consentement est nécessaire ;
S’il résulte du IV bis du même texte,
- que l’occupant des lieux ou son représentant doivent fournir, sans qu’il y ait lieu de les informer préalablement que leur consentement est nécessaire et sous les sanctions prévues à l’art. 1735 quater du CGI, les codes d’accès aux pièces et documents présents sur les supports informatiques qui se trouvent dans les locaux visités, notamment les codes de déverrouillage des ordinateurs et des téléphones mobiles ;
- cette obligation ne s’étend toutefois pas aux codes d’accès à des données stockées sur des serveurs informatiques distants ou à des services en ligne.
Elle juge en conséquence que l’ordonnance de rejet attaquée viole les dispositions de l’art. L. 16 B LPF dès lors qu’il ne ressort pas du procès-verbal de la visite que le contribuable a été informé, préalablement à la communication desdits codes d’accès, que son consentement était nécessaire.
Cet arrêt de la Cour de cassation pourrait avoir des conséquences importantes sur les procédures de visite et de saisie. Si en 2014 la Cour de cassation avait précisé qu'il était possible pour l'administration d'avoir accès à des données stockées à l'étranger au cours de ces procédure de visite, la Haute juridiction judiciaire précise dans ce nouvel arrêt les conditions dans lesquelles l'administration peut avoir accès à celles-ci.
A ce titre, dès lors que les données ne sont pas stockées au sein du lieu visité et sont protégées par un code d'accès, la Cour de cassation précise que l'administration doit obtenir le consentement de l'occupant visité pour que les codes d'accès lui soient communiqués. L'occupant est ainsi en droit de refuser de donner ses mots de passe permettant d'accéder à ces données ce qui pourrait faire obstacle à la saisie de ces dernières.
Il convient de rappeler qu'en ce qui concerne les données stockées au sein de l'entreprise, l'occupant visité doit fournir les codes d'accès sous peine de saisie des supports informatiques, de se voir appliquer une amende pouvant aller jusqu’à 50 000 € ou 5 % des droits rappelés, et de subir une procédure d'évaluation d'office.