L’article 55 de la loi de finances pour 2021 est présenté comme l’achèvement de la réforme sur la fiscalité des véhicules amorcée par la loi de finances pour 2020 (loi 2019-1479 du 28 décembre 2019).
Cet article prévoit plusieurs changements :
En complément, et pour apporter de la visibilité et mettre en évidence la nécessité d’une harmonisation au niveau de l’Union européenne, un rapport sera réalisé sur l’évaluation de la fiscalité automobile française (malus, bonus et prime à la conversion).
Les principaux aménagements apportés par la loi aux règles communes portent sur l’article 1007 du CGI qui a notamment pour objet de définir les termes employés dans les articles suivants qui fixent les règles applicables en matière de fiscalité des véhicules routiers.
Est ainsi reformulée la définition de la première immatriculation d’un véhicule qui s’entend de la première autorisation pour la mise en circulation routière de ce véhicule. Elle est réputée intervenir en France lorsqu’elle est délivrée par les autorités françaises, à titre permanent ou dans le cadre d’un transit temporaire.
Par ailleurs, le texte définit les véhicules relevant du nouveau dispositif d’immatriculation. Ces derniers s’entendent des véhicules dont les émissions de CO2 ont été déterminées selon le cycle d’essai WLTP (Worldwide Harmonised Light Vehicles Test Procedure) prévu par le règlement UE 2017/1151. Cette méthode est obligatoire pour toutes les voitures neuves réceptionnées depuis le 1er septembre 2018.
La loi revoit également le calendrier du passage des émissions en WLTP sur le certificat d’immatriculation dans la mesure où l'échéancier initialement prévu par la loi de finances pour 2020 de prise en compte des émissions WLTP sur le certificat d'immatriculation n'a pu être intégralement tenu. En effet, les émissions WLTP n’ont été prises en compte à compter du 1er mars 2020 que pour les voitures particulières et les camionnettes neuves complètes (M1 et N1), puis à compter du 1er juillet 2020 pour les dérivés VP. Le nouvel échéancier fixé à l’article 1007 du CGI est ainsi le suivant :
Caractéristiques du véhicule |
Date de première immatriculation en France |
---|---|
Véhicules des catégories M1 et N1 complets dont la première immatriculation intervient en France, autre que les véhicules à usage spécial |
à partir du 1er mars 2020 |
Véhicules des catégories M1 et N1 complets à usage spécial dont la première immatriculation intervient en France, autre que les véhicules accessibles en fauteuil roulant |
à partir du 1er juillet 2020 |
Véhicules des catégories M1 et N1 complets ayant préalablement fait l'objet d'une immatriculation hors de France, autres que les véhicules accessibles en fauteuil roulant |
à partir du 1er janvier 2021 |
Véhicules complétés, véhicules accessibles en fauteuil roulant et véhicules des catégories M2 et N2 |
A partir de dates fixées par décret, au plus tard le 1er janvier 2024 |
Rappelons que la méthode d'homologation WLTP entraîne en moyenne une mesure des émissions de CO2 supérieure de 28 grammes par kilomètre à celle qui est mesurée par la précédente méthode NEDC (« New European driving Cycle »), ce qui explique que les dispositifs fiscaux relatifs aux véhicules à moteur prévoient deux grilles ou barèmes différents, afin d’assurer un traitement équitable entre les deux types de véhicules. Certains comprennent même une troisième grille dont le barème est fixé en fonction de la puissance administrative, qui concerne en pratique les véhicules en provenance d'un état tiers à l'Union européenne.
Ces dispositions s’appliquent à compter du 1er janvier 2021.
Uniquement pour l’année 2021, et préalablement à la refonte globale des taxes à l’utilisation des véhicules dont l’application est prévue à compter de 2022, quelques modifications sont apportées à la TVS.
Pour les véhicules relevant du nouveau dispositif d’immatriculation, le barème actuel par tranche de la première composante fixée en fonction du taux d’émission de CO2, prévu à l’article 1010, I bis-a du CGI est remplacé pour 2021 par un nouveau barème linéaire, ayant pour objet un lissage de la taxe, susceptible de s’avérer soit défavorable, soit favorable aux contribuables.
Ainsi, et par exemple, la linéarité favorise les véhicules relevant du nouveau dispositif d’immatriculation émettant 171 g de CO2 par kilomètre mais défavorise ceux qui n’en émettent que 170 g, et l’écart de tarif entre les deux taux d’émission est réduit de 1 118 euros à 62 euros.
Taux d’émission de CO2 |
Tarif selon ancien barème |
Tarif selon nouveau barème |
---|---|---|
170 g/km |
1 105 |
1 751 |
171 g/km |
2 223 |
1 813 |
Par ailleurs, s’agissant toujours de la première composante de la taxe, deux nouvelles exonérations temporaires de 12 trimestres sont ajoutées. Elles concernent les véhicules combinant les carburants suivants :
En ce qui concerne la seconde composante de la taxe, il est prévu à compter de 2021 que le tarif ne s’applique pas aux véhicules dont la source d’énergie est exclusivement l’électricité, l’hydrogène ou une combinaison des deux. Seuls étaient précédemment exonérés les véhicules fonctionnant exclusivement au moyen de l’énergie électrique.
L’article 55 de la loi de finances pour 2021 instaure trois taxes qui étaient, dans leur principe, déjà présentes dans l’environnement juridique :
La taxe sur les véhicules de société (TVS) qui comprenait deux composantes, se scinde désormais en deux taxes annuelles applicable aux véhicules de tourisme utilisés pour les besoins d’une activité professionnelle :
Ces dispositions s’appliquent à compter du 1er janvier 2022. Par ailleurs, la taxe sur les véhicules routiers (TSVR), anciennement régie par les articles 284 bis à 284 sexies bis du code des douanes, qui concerne les véhicules lourds de transport de marchandises, est introduite dans le CGI avec la nouvelle dénomination de « taxe à l’essieu ». La gestion, le recouvrement et le contrôle de cette taxe sont corrélativement transférés à la DGFiP. Par dérogation, la taxe à l’essieu s’applique aux véhicules utilisés en 2021.
Ces trois taxes sont désormais régies par des dispositions communes, étant précisé que pour les besoins de ces dispositions, les entreprises et les activités économiques s’entendent respectivement des assujettis et des activités définis à l’article 256 A du CGI pour les besoins de la TVA. Cette nouvelle définition est susceptible d'entraîner l'élargissement du champ d’application de la taxe à de nouveaux redevables.
Le fait générateur des trois taxes correspond à l’utilisation d’un véhicule pour les besoins de la réalisation d’une activité économique lorsque l’une des conditions suivantes est remplie (CGI art. 1010 bis dans sa version à venir) :
Les taxes deviennent exigibles lors de l’intervention du fait générateur.
Le redevable des taxes est l’utilisateur du véhicule, qui s’entend, selon les cas, du propriétaire, du preneur qui bénéficie d’une formule locative de longue durée, de la personne qui dispose du véhicule, ou encore de l’entreprise.
Le montant des taxes est fixé par les articles 1010 quinquies et suivants du CGI.
Chaque taxe, déterminée par application d’un tarif spécifique, sera due en proportion de l’utilisation annuelle du véhicule par le redevable. Une possibilité d’option pour un calcul forfaitaire de cette proportion sur une base trimestrielle, sous certaines conditions, est maintenue jusqu’au 1er janvier 2023 (taxe due en 2024) pour les composantes de l’actuelle TVS. En ce qui concerne les véhicules dont les frais d’acquisition ou d’utilisation sont engagés par une personne physique et pris en charge par une entreprise, la proportion serait déterminée en fonction du kilométrage parcouru pour les déplacements professionnels. Pour ces derniers véhicules, la somme des deux taxes correspondant aux deux composantes de l’ancienne TVS ferait l’objet d’un abattement de 15 000 €, comme pour l’actuelle TVS.
En pratique, les tarifs devraient rester inchangés par rapport à 2021 :
Cette taxe fait l’objet de nombreuses exonérations, notamment pour les véhicules accessibles en fauteuil roulant, les véhicules exclusivement affectés par le redevable à la location, les véhicules pris en location par le redevable sur une période d’au plus un mois civil ou trente jours consécutifs, les véhicules utilisés pour le transport public de personnes, les véhicules utilisés pour les besoins des activités agricoles ou forestières, les véhicules fonctionnant à l’électricité à l’hydrogène ou une combinaison des deux, certains véhicules hybrides …
Les taxes seront déclarées et liquidées dans des conditions similaires à celles qui prévalent actuellement pour la TVS. Ainsi, pour les redevables de la TVA soumis au régime normal d’imposition, les taxes seront déclarées sur l’annexe 3310-A à la déclaration CA3 déposée au titre du mois de décembre ou du 4è trimestre de l’année au cours de laquelle la taxe est devenue exigible. Toutefois, pour les redevables relevant du régime simplifié, c’est la déclaration CA 12 qui sera utilisée et non plus le formulaire 2855-SD. Aucune déclaration ne sera requise lorsque le montant de taxe dû sera nul.
Les taxes seront recouvrées et contrôlées selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que les taxes sur le chiffre d’affaires. Les réclamations seront présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ces mêmes taxes.
Les modifications de l’article 1012 ter du Code général des impôts ont pour conséquence d’aménager et d’alourdir le tarif du malus dû au titre de la première immatriculation d’un véhicule de tourisme. Ce renforcement est notamment en lien avec les travaux de la Convention citoyenne pour le climat.
Il est ainsi prévu une baisse du seuil d’entrée dans le malus de 5g par an en 2021, 2022 et 2023. Ce seuil passera ainsi de 133 g/km en 2021 à 123 g/km en 2023 (contre 138 g/km en 2020). Par ailleurs, une augmentation de son montant au niveau marginal est prévue, pour atteindre 30 000 euros en 2021, puis 40 000 euros en 2022 et enfin 50 000 euros en 2023 (contre 20 000 euros en 2020).
Trois barèmes existent en fonction des modalités de mesure du taux d’émission de CO2 et, afin de clarifier les règles, l’article 1012 ter du CGI est complété d’un tableau récapitulatif du barème à appliquer :
|
Barème | |
---|---|---|
Les véhicules relevant du nouveau dispositif d’immatriculation | Barème CO2 – WLTP |
|
Les véhicules ne relevant pas du nouveau dispositif |
Soit réceptionnés UE | Barème CO2 – NEDC |
Soit non réceptionnés UE | Barème en puissance administrative |
Parmi les aménagements apportés, on soulignera également une exonération pour les véhicules dont la source d'énergie est exclusivement l’électricité, l’hydrogène ou une combinaison des deux. Ces dispositions s’appliquent pour les certificats d’immatriculation délivrés à compter du 1er janvier 2021.
La loi exonère temporairement de taxe spéciale sur les contrats d’assurance les primes versées au titre des contrats d’assurance relatifs aux véhicules électriques (assurance obligatoire et assurance facultative contre les risques de toute nature). Ces dispositions s’appliquent aux primes, cotisations et accessoires dont l’échéance interviendra entre le 1er janvier 2021 et le 31 décembre 2023 (art. 153).
La loi met en place à compter du 1er janvier 2022 un nouveau malus sur la première immatriculation des véhicules de tourisme à partir de 1800 kg (« malus au poids »), codifiée au nouvel article 1012 ter A du CGI. Le tarif de cette taxe est fixé à 10 € par kg. En sont exonérés les véhicules accessibles en fauteuil roulant ou appartenant à des personnes titulaires d’une carte d’invalidité ou ayant la charge effective et permanente d’un enfant titulaire de cette carte, ainsi que les véhicules hybrides rechargeables de l’extérieur dont l’autonomie en mode tout électrique en ville est supérieure à 50 km. Certaines réfactions sont prévues en faveur des familles nombreuses ou des entreprises ou personnes morales. Ce nouveau malus est plafonné de telle sorte que son montant, cumulé avec celui du malus CO2, ne dépasse pas le montant maximum du malus CO2 (soit 40 000 € en 2022 et 50 000 € en 2023) (art. 171).