TVA/Douanes

Refonte du système de franchise en base de la TVA et extension aux assujettis établis dans l’Union européenne (PLF art. 10)

Actuellement, le régime de la franchise en base de TVA prévu à l’article 293 B du CGI ne s’applique qu’aux assujettis établis en France, et non aux assujettis étrangers, qui doivent s’immatriculer à la TVA en France dès qu’ils réalisent des opérations générant une telle obligation, et ceci dès le premier euro.

La directive (UE) 2020/285 du 18 février 2020 est venue simplifier les obligations déclaratives des petites entreprises, en prévoyant notamment la mise en place d’un seuil de franchise européen.

Cette directive serait transposée par la loi de finances pour 2024. A compter du 1er janvier 2025, les assujettis établis dans l’Union européenne (uniquement, à l’exclusion des assujettis établis hors Union européenne) pourraient bénéficier du régime de la franchise non seulement dans leur État d’établissement mais également dans les autres États membres à condition de ne pas dépasser 100 000 euros de chiffre d’affaires au niveau européen lors de l’année précédente et lors de l’année en cours.

En pratique, les entreprises dont le siège est en France devront adresser une notification préalable à l’administration française de leur intention de faire usage de la franchise dans un autre Etat membre. Un numéro individuel d’identification aux seules fins de l’application de cette franchise sera délivré par l’administration française. Ces entreprises devront souscrire en France des déclarations trimestrielles afin de déclarer le chiffre d’affaires réalisé dans chaque État membre.

En parallèle, le plafond national de chiffre d’affaires réalisé en France fixé par l’article 293 B subsisterait, mais serait ajusté. Il serait fixé à 85 000 euros pour l’année civile précédente et 93 500 euros pour l’année civile en cours (contre respectivement 91 100 et 100 100 euros actuellement). Pour les prestations de services autres que les ventes à consommer sur place et prestations d’hébergement, il serait fixé à 37 500 euros pour l’année civile précédente et 41 250 euros pour l’année en cours (contre 38 600 et 39 100 euros actuellement).

En cas de dépassement d’un plafond national pour les opérations de l’année en cours, la franchise cesserait de s’appliquer immédiatement.

Le dépassement du plafond global européen de chiffre d’affaires de 100 000 euros ferait également perdre immédiatement le bénéfice de la franchise dans les États membres autres que celui ou ceux dans lesquels l’entreprise concernée est établie.

Enfin, un système européen d’échange de données serait mis en place pour suivre l’application de ce régime pour les entreprises exerçant leur activité dans plusieurs États membres.

Aménagement des règles de redevabilité de la TVA à l’importation (PLF art. 19, I, 1° ,6° et 7°)

Les règles de la TVA à l’importation seraient adaptées pour lutter contre les fraudes, en particulier la pratique du “dropshipping”.

Cette pratique commerciale consiste, pour un intermédiaire, à acheter un bien situé dans un territoire tiers à l’Union européenne et à le revendre – en pratique, à un prix significativement plus élevé que le prix d’achat - pour le faire livrer directement en France sans jamais en disposer physiquement.

Afin de sécuriser les montants déclarés à l’importation, ces intermédiaires deviendraient par principe redevables de la TVA à l’importation sur les ventes à distance de biens importés (directes ou indirectes).

Ces règles devraient être articulées avec les règles de fiction d’achat-revente et de redevabilité à la TVA d’importation applicables aux plateformes facilitatrices de ventes à distance de biens importés (CGI, art. 256, IV et 293 A, 2, 2°).

En effet, en l’absence d’intervention d’une interface électronique facilitatrice, le redevable de la TVA à l’importation des marchandises dans le cadre d’une vente à distance de biens importés est actuellement le destinataire des biens indiqué sur la déclaration d’importation (CGI, art. 293 A, 2, 3°, a). Néanmoins, dans le cadre du nouveau dispositif, et si la vente est réalisée par un dropshipper, celui-ci se substituerait au destinataire des biens dans la redevabilité de la TVA à l’importation.

Les nouvelles règles prévoient ainsi de renverser le principe de redevabilité pour ces opérations et c’est le vendeur qui serait désormais par principe redevable de la TVA sur ces opérations.

Par ailleurs, dans les cas où la valeur déclarée en douane des biens importés diffèrerait de la valeur de la vente à distance de biens importés, le régime spécifique des expressistes, au titre duquel les expressistes sont autorisés à acquitter, pour le compte des destinataires des marchandises, la TVA d’importation due à raison d’importations de biens d’une valeur inférieure à 150 euros, ne pourra pas être appliqué (PLF, art. 19, I, 7°).

Les intermédiaires pratiquant le “dropshipping” avec livraison des biens en France pourront néanmoins toujours considérer que le destinataire de la vente est redevable de la TVA à condition notamment de s’assurer que la base d’imposition de la TVA due à l’importation est égale à celle qui serait déterminée pour la vente à distance si elle était localisée en France. Cependant, la personne qui réalise la livraison de bien importé serait le cas échéant tout de même solidairement redevable de la TVA à l’importation.

En outre, dans les situations autres que les ventes à distance de biens importés (i.e., article 293 A, 3° nouveau), le redevable de la TVA à l’importation serait désormais le destinataire de la vente mais uniquement à condition que la valeur en douane soit déterminée à partir de la valeur transactionnelle. En revanche, si la valeur en douane n’est pas déterminée à partir de la valeur transactionnelle, le redevable de la TVA à l’importation serait le débiteur de la dette douanière.

TVA - Autres mesures

  • Extension du taux intermédiaire de TVA de 10 % relatif au logement locatif intermédiaire à certaines zones spécifiques visées par le Code de l’urbanisme et le Code de la construction et de l’habitation (PLF art. 6, I, 5°)
  • Suppression de l’exonération de TVA applicable aux livraisons et services d’intermédiation relatifs aux annuaires et publications périodiques édités par les établissements publics et certains organismes publics sans but lucratif (PLF art. 12, I, 13°)
  • Ajustement du mécanisme d’autoliquidation domestique de la TVA applicable aux transferts de certificats de garanties d’origine, certificats de garanties de capacité et certificats de production visés au Code de l’énergie (PLF art. 19, I, 2°)
  • Transfert de compétence entre la DGDDI et la DGFIP en matière de collecte de la TVA relative aux transports hors-UE (PLF, art. 19, I, 8°, b)
  • Dispense d’immatriculation à la TVA des entreprises étrangères réalisant des importations de biens (i) mis en libre pratique ou placés en admission temporaire en exonération partielle de droits sur la base de la déclaration verbale ou (ii) destinés à être utilisés ou cédés à titre gratuit dans le cadre de foires, expositions et manifestations similaires (PLF art. 19, I, 3°, a)
  • Ajustement du dispositif du mandataire ponctuel pour les assujettis non établis et non immatriculés à la TVA en France ne réalisant en France que (i) des importations pour lesquelles la TVA d’importation est entièrement déductible et (ii) des opérations exonérées avec droit à déduction, soumises à dispense de paiement de la TVA ou à suspension d’exigibilité précisées par décret (PLF art. 19, I, 5°)
  • Obligation pour les représentants en douane (directs et indirects) de transmettre aux entreprises l’ensemble des informations relatives aux importations dédouanées pour leur compte (PLF art. 19, I, 6°, b).

Adaptation des tarifs d'accise sur les énergies (PLF art. 11)

L’article 11 du PLF 2024 vise à maintenir, pour la période du 1er février 2024 au 31 janvier 2025, un tarif d’accise sur l’électricité au niveau minimum permis par le droit européen dans le cadre du bouclier tarifaire. 

De plus, cet article prévoit que le gouvernement pourrait, par arrêté, augmenter le tarif d’accise sur le gaz naturel utilisé comme combustible, dans la limite de 8 €/MWh. Le recours à un arrêté est justifié par la nécessité d’évaluer préalablement l’évolution des prix hors taxes avant de déterminer le tarif en 2024.

Réduction progressive de dépenses fiscales défavorables à l’environnement (PLF art. 12)

L'article 12 du PLF 2024 vise à réduire progressivement les dépenses fiscales défavorables à l’environnement. Il prévoit : 

  • Une augmentation graduelle sur sept ans du tarif d’accise sur le gazole non routier (GNR) en vue de l’application du tarif normal au 1er janvier 2030 (+5,99 c€/L/an), à la place de la suppression du tarif réduit qui devait intervenir au 1er janvier 2024 initialement.  

  • Une augmentation progressive sur le gazole consommé pour le besoin des travaux agricoles (+2,85 c€/L/an) jusqu’au tarif réduit de 23,81 c€/L en 2030 ;

  • La suppression au 1er janvier 2024 des tarifs réduits sur les produits pétroliers (hors gaz naturels et charbons) consommés par les entreprises grandes consommatrices d’énergie, ainsi que les charbons consommés par les entreprises grandes consommatrices d’énergie exposés à la concurrence internationale. 

Renforcement des incitations fiscales à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports (PLF art. 13)

L'article 13 du PLF 2024 vise à renforcer les incitations fiscales à l'utilisation des énergies renouvelables dans le secteur des transports, notamment par le biais de :

  • l’augmentation, dès 2025 de l’objectif d’utilisation d’énergie renouvelable pour la catégorie essences (de 0,6 point), des gazoles (de 0,4 point), des carburéacteurs (de 0,5 point) au sein de la Taxe sur l’Incorporation des Energies Renouvelables dans les Transports (TIRUERT),

  • la limitation d’incorporation des graisses et huiles usagées,

  • la suppression du double compte pour les carburéacteurs.

Mise en œuvre du transfert du recouvrement des contributions indirectes à la DGFiP (PLF art. 18)

L’article 18 du PLF 2024 prévoit la poursuite du transfert de compétences de la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) à la Direction générale des finances publiques (DGFiP). 

Ainsi, il est prévu le transfert du recouvrement des accises sur les tabacs et les alcools à la DGFiP dès 2024, incluant également la taxe premix, la cotisation sécurité sociale sur les boissons alcooliques et le droit de licence pour le tabac.  Ce transfert vise à uniformiser les règles de gestion et à rendre, par le biais d’un texte règlementaire, obligatoire la télédéclaration ainsi que le télérèglement. 

L’article instaurerait une exception pour les bouilleurs de cru particuliers afin d’éviter les formalités déclaratives trop importantes qui seraient nées de ce transfert de compétence. Un régime fiscal serait ainsi aménagé, prévoyant une exonération d’accise pour les personnes produisant de petites quantités d’alcools à des fins de consommation propre. Si le recouvrement de l’ensemble des accises était transféré à la DGFiP, la DGDDI continuerait de s’assurer du respect des conditions relatives à cette exonération pour les petits bouilleurs de cru. 

Enfin, l’article prolongerait de deux ans l’habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance en vue de recodifier les dispositions relatives au Code des impositions sur les biens et services (CIBS)

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José Manuel Moreno

José Manuel Moreno

Avocat, Associé TVA & Indirect Tax, PwC Société d'Avocats

Stéphane Henrion

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Of Counsel, PwC Société d'Avocats

Luana  Higino Balbino

Luana Higino Balbino

Directeur, Douanes, PwC Société d'Avocats

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